La Gazette de GREENWOOD
n°33 (Juillet 2001)

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Le Jeudi 21 Juin 2001, jour de la fête de la Musique en France, John Lee Hooker décédait à 83 ans à son domicile de Los Altos, au sud de San Francisco.

Good bye, John Lee
and thanks for everything

John Lee Hooker

de Gérard Herzhaft:

Dire que le décès de John Lee Hooker laisse un vide considérable dans le monde du blues est un euphémisme. Même très diminué par l'âge et des problèmes de santé, le vieux maestro demeurait une référence essentielle, une source vivante qui indiquait par ses interviews ou par ses incursions en studio ou sur scène, ce qu'était le blues joué par un bluesman. De sa classe, de sa catégorie, de sa stature, il ne reste dans le monde des vivants que B.B. King.

Pour les amateurs de ma génération, ceux qui ont découvert le blues à la fin des 50's et au début des 60's, la disparition de Hooker - après celle de tous les bluesmen qui nous ont fait aimer le blues: Howlin' Wolf, Muddy Waters, Sonny Boy Williamson, Lightnin' Hopkins et hélas tant d'autres - renvoie désormais dans l'histoire et dans les souvenirs un blues encore imprégné des langages et des traditions du monde noir des ghettos des villes et des campagnes sudistes. Un univers qui était seulement en train d'être découvert par les Blancs américains et européens, qui commençait à peine à inspirer des apprentis-musiciens extérieurs à la communauté noire américaine et qui n'imaginait absolument pas ce qui allait suivre, cette appropriation progressive du blues par le monde du rock et les changements de manières, d'attitudes et finalement de la musique elle-même. Car, contrairement à ce que n'ont cessé de répéter à satiété radios et télés au lendemain de la mort du vieux bluesman, John Lee Hooker n'était pas seulement grand parce qu'il avait influencé des gens aussi "merveilleux" que Carlos Santana mais d'abord par la place éminente qu'il avait réussi à conquérir dans l'univers du blues et auprès de ses compatriotes Africains-américains, et ceci dès les années 40.

Souvenirs personnels? Si Lightnin' Hopkins a été mon tout premier contact avec le monde du blues, je crois bien que Hooker est arrivé juste après. J'avais acheté, un peu par hasard, un 45t EP qui comprenait quatre titres par Big Bill Broonzy, Muddy Waters, Alec Seward et le "Whistlin' and moaning blues" de Hooker, un morceau dans lequel il se contente de murmurer et de siffler sur un canevas de guitare électrique suramplifiée (et qui figure en CD dans l'anthologie "Wild and young": Frémeaux & Associés FA 265). Que les lecteurs de "La gazette de Greenwood" imaginent l'impact d'un tel morceau sur les oreilles de jeunes auditeurs d'alors qui n'avaient jamais entendu quelque chose de similaire, le contact brutal, presque sensuel et physique, avec un monde étrange, étranger, rugueux, envoûtant, totalement fascinant. Je me souviens les centaines de fois que j'ai mis ce titre sur mon électrophone et comment, souvent en compagnie de mon frère Cisco, je l'écoutais, subjugué. Dès lors, je n'eus de cesse de chercher d'autres titres par cet incroyable musicien dont nous ne savions alors rien: qui il était, d'où il venait, quand il avait enregistré. Etait-il seulement vivant? Peu à peu, en Angleterre puis chez des soldeurs français, j'ai réussi à trouver des LP's de John Lee Hooker sur le label Crown, une collection destinée à être vendue dans les supermarchés des ghettos noirs américains. La qualité sonore était épouvantable, le qualificatif de Low-Fi tout à fait justifié, l'aiguille de mon tourne-disque menaçait à tout moment de traverser la mince couche de vinyle. La pochette du disque était ornée d'une photo de pin-up noire et ne portait bien sûr aucun texte et encore moins de note discographique. On ne savait pas d'où tout ça venait mais cette musique extraordinaire résonnait dans ma chambre d'étudiant et finissait par intriguer mes voisins même les moins tournés vers ce type de musique.

Et puis... le choc de voir John Lee Hooker sur scène à l'occasion de l'American Folk Blues Festival. La voix était la même que sur le disque mais il était là, un homme encore jeune et fringuant, assis sur un tabouret, psalmodiant son blues avec cette voix caverneuse et lançant quelques notes de guitare électrique... absolument extraordinaire. Puis la rencontre en coulisses. Son étonnement d'être connu jusque dans ce qui était pour lui, à l'époque, un pays lointain et exotique. Et ma stupéfaction de voir avec quelles difficultés il réussissait à peine à inscrire son nom sur les LP's Crown que je lui avais amené pour une dédicace que je garde encore aujourd'hui comme un de mes plus précieux souvenirs. Je crois bien que c'est à ce moment-là que j'ai décidé d'aller un jour, coûte que coûte, en Amérique noire voir ce qu'était vraiment ce monde du blues qui possédait des créateurs prodigieux qui n'avaient jamais eu les moyens d'apprendre à lire et écrire.

Hooker est alors souvent revenu en Europe et en France, a connu des hauts et des bas. Ses tournées étaient souvent loin d'être triomphantes et les salles qui l'accueillaient étaient parfois quasi-vides. Je ne crois pas avoir raté au moins à un endroit ou un autre aucun de ses nombreux passages sur nos rivages et j'ai pratiquement à chaque fois pu le revoir, discuter avec lui et même deux fois partager son dîner dans le petit hôtel bon marché que sa modeste tournée lui permettait d'occuper. Sauf lors de sa dernière venue dans les années 90 lorsque je venais lui remettre en mains propres la biographie que je venais de lui consacrer. A ce moment-là, un service d'ordre musclé ne m'a pas laissé approcher celui qui était finalement et à juste titre devenu une vedette internationale!

J'ai également rencontré longuement et interviewé John Lee dans un Motel 6 de WAshington D.C. dans les années 70. Malgré le coup de pouce des Canned Heat, sa carrière (comme sa vie personnelle) était alors en panne. Il ne pouvait plus se payer un orchestre et tournait seul aux quatre coins des USA dans des "petits lieux", joignant difficilement les deux bouts. Il ne se doutait pas que quelques années plus tard il deviendrait le "Healer" et le chouchou des artistes comme de la presse rock. Mais il avait le sentiment très net d'avoir marqué l'histoire du blues et cela le rendait très fier. En relisant cette interview aujourd'hui, je ne perçois aucune amertume. Il se complaisait surtout à raconter sa vie et d'innombrables anecdotes (plus ou moins réelles, me semble-t-il), mettant en scène quantité de personnages, obscurs ou célèbres.

Je suis persuadé qu'aujourd'hui qu'il a rejoint ces vieux compagnons de musique et de virées, il s'asseoit avec eux pour jouer de la guitare et raconter quelques bonnes histoires de cette élocution hachée (il avait réussi à surmonter un bégaiement très prononcé mais cela revenait assez souvent quand il était fatigué) si caractéristique.

Good bye, John Lee and thanks for everything.

Gérard Herzhaft

de Cisco Herzhaft:

J'ai de John Lee Hooker, que j'ai accompagné quelques jours en tournée dans le sud ouest de la France, il y a plus de trente ans, ce souvenir qui s'est ravivé lorsque j'ai appris sa disparition charnelle.

Chaque fois que je jouais à ses côtés, sans jamais aucune consigne ni répétition, juste en appuyant une rythmique basse, comme il me l'avait demandé, j'essayais de savoir si ça lui convenait... Systématiquement, il me disait "very good" en me tapant sur l'épaule. S.P. Leary, lui, qui normalement était seul à tourner avec John Lee, me faisait un clin d'oeil mais ne disait rien.

En fait, je crois bien que ça leur était égal, et je n'ai jamais su si ça leur plaisait ou pas...

Seul le feeling comptait, et d'ailleurs, toute l'émotion reste....

Cisco Herzhaft




de Patrice Champarou:

Il y a comme cela une poignée d'artistes que j'ai toujours rêvé de rencontrer, non pas comme musiciens, mais en tant qu'êtres humains : Billie Holiday, Woody Guthrie, Leadbelly ( eh oui... un peu trop jeune! ) John Coltrane, Mance Lipscomb, Georges Brassens, Pete Seeger ( encore vivant à ma connaissance ) et John Lee Hooker... peut-être d'autres, pas certain!
     

de Yann Leroux:

bloody friday !

Ce type etait un grand, tres grand griot. J'ai été submergé par son tupelo blues, son riff répétitif et la melopée. Il jouait toujours la même chose, mais avec quel talent. Lorsque je l'ai connu, il etait deja papy JLH mais lorsqu'il parlait, dans les interwiew, on entendait le gosse du mississipi : "yes mdam". Sa voix était d'ailleurs comme ce fleuve, lente, charriant du bois mort, avec des moments où le courant pouvait être tumulteux. Et ce boogie ! Repris par tous, inventé (autoproclamation ou pas ?) par JLH, hypnotique, animal, sensuel "i am a crawling kingsnake, baby" il vous prennait aux tripes. Il y a un morceau de toute beauté ou Miles Davis y tricote sa trompette, Hot spots, je crois. Et ce duo avec Bonnie Raitt... La voix grave du papy et l'aiguë de la dame, une sorte de sucré-salé excellentissime.

Un grand bluesman, vraiment.

Yann Leroux

     

John Lee était pour moi le dernier lien vivant entre le blues d'avant-guerre et l'époque contemporaine, peut-être le seul avec BB King qui sache ce que sont une mule ou une charrue... image "romantique" tant décriée par nos collègues américains? Peut-être, mais également une réalité musicale et humaine.

John Lee Hooker, c'est bien évidemment des centaines de morceaux répétitifs, les innombrables boogies de ses débuts, des banalités en petite formations avec cuivres... quand on a décidé de vivre de sa musique, et qu'on n'a comme atout qu'un timbre de voix d'une rare intensité et un jeu de guitare rudimentaire, on ne se pose même pas la question de savoir s'il s'agit de "concessions", on joue, on travaille en somme - et Hooker pouvait affirmer avec fierté que sa famille n'avait jamais été dans la dèche, ce qui n'est déjà pas si mal!

Mais c'est le Hooker intimiste auquel je demeure le plus attaché, celui dont les accords rappelaient étrangement Henry Townsend, l'homme seul qui marquait le rythme en frappant du pied sur une planche "amplifiée" comme Skip James ou Charlie Patton l'avaient fait vingt ans auparavant, celui dont la voix vibrait en rythme dans Worried Life Blues, celui qui créait seul une tension digne des meilleurs orchestres de swing dans Baby Please Don't Go ou Lonely Boy Boogie... et mieux encore, un disque renié par tous les puristes pour lequel il a accepté de jouer non seulement en acoustique, mais sur une guitare classique - cordes de nylon, aucun doute à l'audition! Black Snake Blues était son titre, aujourd'hui réédité sous le nom "The Country Blues Of John Lee Hooker". L'intention commerciale est évidente, mais outre quelques-uns de ses morceaux habituels, John Lee a joué le jeu en reprenant de vieux traditionnels ( Pea Vine Blues ) ou en composant lui-même des chansons d'inspiration rurale dans lesquelles il s'inverstit totalement ( I Rowed A Little Boat, Church Bell Tone, Behind the Plow... ) et peut-être la toute première version de Tupelo Blues, en tous cas la première que j'ai entendue lorsque j'avais 20 ans...

Le John Lee que j'ai vu à la télé, adulé mais modeste, loquace mais soucieux de préserver sa sieste, est pour moi davantage celui de Tupelo que de Boom Boom... un homme enrichi par le succès comme pouvait l'être Jelly Roll Morton du temps de sa gloire, mais totalement détaché des biens matériels, simple et humain, conscient de ce que le blues signifie pour lui, de ce qu'il a signifié durant des décennies, et de ce qu'il signifie encore aujourd'hui.

Bye, John Lee, moi qui n'ai foi en aucun au-delà je sais que notre éternité est plus belle que tout ce que peuvent rêver les croyants : la mémoire d'un homme préservée dans la conscience des vivants.

Patrice Champarou

"There's a lot of things that give you the blues, that give me the blues, that give any man the blues... it's somewhere down the line that you have been hurt some place"



John Lee Hooker dans la phonothèque de Greenwood:
"The Healer" LGDG n°22
" Hooker’n’Heat" La Phonothèque de Greenwood n°1

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Steve Waring
Blues

(Tout Court)

Date: 10 Juin 2001
De: Uncle Lee <stagolee@club-internet.fr>
(photos: Pierrot Mississippi Mercier <mississippi@wanadoo.fr> )

Il y a de multiples raisons de considérer ce disque comme indispensable, pour peu qu'on soit amateur de guitare acoustique et/ou de country-blues, et les trois principales raisons sont écrites en gros caractères sur la pochette du disque compact :

Steve Waring (photo Pierrot Mercier, 1975?)
Steve Waring, en 1975 (?)
(photo Pierrot Mercier)
1 - Steve Waring: Né en 1945 (Cambridge, Massachusett, U.S.A.), Steve Waring est dés l'enface attiré par le blues et les musiques traditionnelles et il écoute notamment Big Bill Broonzy, Dave Van Ronck, Brownie Mc Ghee, Leadbelly. S'initiant à la guitare dans les hootenanies (ces réunions pour chanter et jouer toutes sortes de musiques), il deviendra bien vite un fin guitariste.

Arrivé à Paris en 1965, cet américain sera un des pionniers de la guitare acoustique américaine en France. Il fut un pilier du Centre Américain où se déroulaient les fameux hootenanies, véritable pépinière de guitaristes où se rencontraient des musiciens tels que Hugues Aufray, Joe Dassin, Bill Deraime, Gabriel Yacoub, Alain Giroux, Marcel Dadi

Avec Roger Mason (un autre américain émigré en France), il fut le premier de cette "bande" à enregistrer en France un disque instrumental où on entend du picking (1) en tant que tel. Ce disque (Guitare Américaine, 1970) précède de deux ans le premier disque de Marcel Dadi (pour l'anecdote, La Guitare à Dadi fut enregistré en trois heures alors que Dadi avait 40° de fièvre, avec une guitare Martin D28 prêtée par… Steve Waring !) qui remporta le succès que l'on sait et marqua le début des folles années du picking en France. Chaque musicien du Centre Américain suivit son propre chemin (folk, country, blues, variété, etc), et à la fin des années 70, Steve Waring semble quitter le circuit en allant s'installer dans la région lyonnaise. Dans les années 80 et 90, on le retrouve dans la chanson pour enfants (avec pas moins de 16 disques qu'on ne saurait que conseiller pour le jeune public !).

Visiblement, son amour de la guitare picking n'a pas faibli (c'est d'ailleurs la technique qu'il emploie souvent dans ses chansons pour enfants), et en 1994 est ressorti en CD une compilation d'instrumentaux à deux guitares de titres enregistrés par Roger Mason et Steve Waring en 1970 et 1975. Ce disque, Guitar Picking (décidément, Waring et Mason ont le don pour trouver des titres simples et précis !) est un vrai bijou du genre. Et voici donc, en 1998, le disque qui nous intéresse : Blues.

2 - Blues, c'est le titre du disque, on ne peut être plus clair ! Ce disque est un hommage au célèbre "Traditionnel" qui a signé 8 titres (2) sur les 12 chansons qui le composent. Steve Waring ne cherche pas à reproduire le son des enregistrements d'avant-guerre : il nous joue un picking impeccable et limpide, et le trombone d'Alain Gilbert vient rajouter une touche Nouvelle-Orleans sur deux titres. Deux autres sont joués en slide, en accordage standard, et un autre est joué au banjo, instrument que Steve Waring aime utiliser, en picking toujours. Steve Waring: Blues

Pas d'ambiance poisseuse, de dissonances plus ou moins volontaires et d'à-peu-près : ce n'est pas le style de Steve Waring! Il ne force pas sa voix qui reste dans un registre doux, presque intimiste mais parfaitement expressif. Il nous interprète des traditionnels avec un infini respect des créateurs et des auditeurs. Bref, Steve Waring n'est pas un bluesman, mais plutôt un songster qui ici nous interprète des blues.

Ses compositions (3) sont dans la même veine, avec en plus un côté naïf typique de Steve Waring !

3 - Avec Tablatures, eh oui ! comme au bon vieux temps des 33 Tours de guitare picking le disque possède un livret comprenant l'intégralité des morceaux retranscrits en tablatures (4). Une aubaine pour les " pressés " qui veulent tout de suite jouer sur leur guitare, mais surtout pour ceux qui veulent apprendre. Ceci dit, format CD oblige, il faut de bons yeux pour jouer tout en lisant la tablature…. Le format 33 Tours était quand même plus lisible ! Pour le CD Guitar Picking les tablatures sont dans un recueil appelé Anti-Méthode de Guitare Folk (clin d'œil à la méthode de qui-on-sait !) et peuvent être commandées (chez Harmonia Mundi). Une tradition bien ancrée !

4, 5, 6 ... Plus...

Graeme Allwright (photo Pierrot Mercier, 1975?)
Graeme Allwright, en 1975 (?)
(photo Pierrot Mercier)
Mais ce n'est pas tout ! Ce disque recèle encore des surprises dont la plus osée est certainement le fait que tous les titres sont chantés en français, Steve Waring ayant traduit avec Alain Gilbert ces classiques du blues qui deviennent donc Trou Dans La Tête, L'Hôpital Saint-Jacques, … (5)

A ma connaissance, c'est la première fois que quelqu'un ose faire ces traductions (en tout cas sur un disque entier). Peut-être fallait-il être américain comme Steve Waring pour se le permettre sans complexe! Les traductions, sans être littérales, respectent l'esprit des chansons, ce qui est facilement vérifiable puisqu'il chante parfois des couplets en anglais et que les deux versions sont reproduites sur le livret. Vraiment une très bonne idée, et ça passe très bien surtout avec le léger accent américain du chanteur.

L'accent est même parfois néo-zélandais puisque, nouvelle surprise, Graeme Allwright vient seconder au chant son ami sur trois titres. Quel bonheur ! Quelle voix !

Mais attention, ce disque ne s'adresse pas qu'aux quadra ou quincagénaires nostalgiques, c'est bien un disque de country-blues, de guitare acoustique et de chant. Il s'adresse à tous, et peut même être l'occasion pour les plus jeunes d'aborder le country blues de façon douce...

Un disque à mettre entre toutes les mains, qui est aussi l'occasion de rendre hommage à un personnage clé de la guitare et du blues en France : Steve Waring.

Références CD :
Blues, Steve Waring, 1998, Rym Musique, label PODYS, 1919562
Guitar Picking, Steve Waring & Roger Mason, 1994 (enregistrements 1970/1975) Le Chant du Monde, Harmonia Mundi, LDX 274 969

(1) picking : technique de jeu à la guitare où le pouce de la main droite joue la ligne de basses tandis que un, deux, trois ou quatre (c'est rare !) des autres doigts jouent la mélodie sur les aiguës. Cette technique est très ancienne et est couramment utilisée par les musiciens de country-blues et country music du début du 20ème siècle (à nos jours).

(2) Trouble In Mind, Saint James Infirmary, Betty & Dupree, Come Back Baby, Rich And Rambling Boy, Nobody Knows You, Columbus Stockade, Nicotine

(3) Mes Oreilles n'Ont Pas De Paupière, Jean Doucement, Mal De Chien, Boum Kaka

(4) La tablature est une façon d'indiquer l'emplacement des doigts sur le manche de la guitare.

(5) Trou Dans La Tête, L'Hosto Saint-Jacques, Maggie & Lazare, Amour Reviens, Le Vagabond, La Dèche, Le Bagne, Nicotine

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e-interview:
Michel Batrel,
Coach du Lisieux Blues Festival

Date: 8 Juin 2001
De: Docteur Blues <docteur.blues@free.fr>

LGDG: Le prochain festival est en cours de programmation, peux-tu nous donner quelques noms qui seront l'affiche 2001 ?

Michel Batrel : Notre prochain et 12e Lisieux Blues Festival (L.B.F.)se déroulera du 28 septembre au 7 octobre avec nos deux grandes soirées exceptionnelles les vendredi 6 et samedi 7 octobre.
Je commence à peine notre programmation donc il n'y aura pas de scoop ni même de tendance j'en sais très peu moi-même.
Comme toujours je souhaite une programmation diversifiée, riche de découvertes et d'originalités jusqu'aux dernières et parfois extrêmes limites.
La recette du L.B.F. c'est un peu de folie, une pincée d'angoisse et une grosse envie de faire découvrir et énormément de partage avec le public.

Notre nouveau site www.lisieuxblues.com diffusera dès que disponible le programme de notre 12e L.B.F.
Une demande par Email a postmaster@lisieuxblues.com permet de s'abonner à une liste de diffusion.

LGDG: Les groupes régionaux sont toujours bien représentés à Lisieux (ça fait plaisir !) les années précédentes on a pu entendre : Cat-fish, les Hoodoomen, Long distance, Thierry Anquetil, les SoulMen, le Broadway Gospel Group... C'est une véritable politique de promotion des bluesmen du cru ? As-tu remarqué une nouvelle génération de musiciens dans la région ?

M.B. : Il est évident pour nous que le L.B.F. fasse la promotion du blues régional.
Nous présentons donc une palette d'un juste équilibre entre artistes régionaux, nationaux et internationaux.
Notre belle Normandie est semble t'il un vivier de bons musicos blues depuis très longtemps : Patrick Verbeke, Thierry Anquetil, Guillaume Petite, The Hoodoomen et bien d'autres.
Il y a également les 'petits nouveaux' que nous aidons à se révéler. Les excellents 'Soulmen' de Caen une bande de 10 copains, dix musiciens de grande classe qui jouent du RnB avec une pèche d'enfer Notre découverte 2000 'Lullaby', 5 sax déchaînés issus de l'école de musique d'Argentan.
Et nos jeunes de 'Jad' pur produit de notre association 'Lisieux Blues Développement'.
Et bien d'autres.
Un bon nombre de belles manifestations Blues dans la région citons la nuit du Blues de Caen, Quai des Blues de Regneville, Swingin' à Deauville, Jazz sous les pommiers, Blues à Gogo du Havre, Le festival de la Traverse à Cléon.
Le blues n'est pas seulement urbain et ses origines sont bien rurales. Ce n'est pas toi qui me le reprochera, je crois savoir que tu as des attaches normandes.

LGDG: Le Festival a une particularité bien sympathique, il investit les rues de la ville, les écoles, les hôpitaux, les grands magasins, les églises... et ces dernières années il a été présent dans plusieurs villes périphériques. Vous avez été des précursseurs de ce genre d'opération. Que peux-tu nous dire à ce sujet ? En sera t'il de même pour cette nouvelle édition ?

M.B. :En effet nous avons été novateur dans ce domaine. Depuis 2 ans nous nous sommes ouverts le plus largement possible avec des concerts repartis dans plusieurs villes partenaires Honfleur, Trouville, Orbec et plus récemment Argentan et nous sommes encouragés par l'augmentation de la fréquentation de ces concerts d'une année à l'autre c'est la magie du bouche à oreille.
Notre grande fête du blues est un moment festif à faire découvrir et partager le plus largement possible aussi nous l'amenons près du public : dans les écoles, les lycées, les bars, l'hopital, la rue, le marché et partout où cela est possible.
Le blues est la mère de beaucoup de nos musiques actuelles : il faut le faire savoir et attirer les jeunes de 7 a 77 ans devant notre scène.
Des enfants malades pleins de joie et d'espoir jusqu'à nos aînés qui viennent écouter et parfois découvrir le blues, dansant et faisant la fête comme des fous : c'est super.
Pas de 'musique du diable' dans la Cathédrale mais du Gospel qui draine encore un autre public.
Egalement un travail pédagogique sur les musiques afro-américaines dans les écoles, collèges et lycées de la ville avec conférence, démonstration et pratique.
De plus l'association 'Lisieux Blues Développement' travaille toute l'année à la promotion de la musique dans les quartiers avec des intermittents du spectacle (D. Cantegrit, J. Eynard, T. Anquetil, Tao Ravao, V. Bucher et d'autres).
Un vrai travail de fond.

LGDG: J'ai le sentiment que le programme du festival est souvent original comparé aux grosses tournées blues européennes ? peux-t-on parler d'un label Jazz-Calva-Blues ?

M.B. :Nous avons toujours voulu sortir des sentiers battus et n'ayant pas de gros moyens financiers nous devons jouer sur les volets découverte, originalité et diversité du blues.
Un label ? : Oui en effet l'association 'Jazz Calva Blues' a une licence de production afin de faire la promotion de groupes régionaux, nationaux et internationaux. (Tournées, Albums)
Un gros travail est fait régionalement et inter-régionalement (Haute et Basse Normandie) grâce à 'Jazz Calva Blues' mais peut être existe-il un certain 'Parisianisme' dans les médias qui oublient les vieux frères provinciaux.

LGDG: Remettez-vous toujours cette fameuse bouteille de Calvados aux artistes après leur concert ? vous êtes sponsorisés par Père Magloire (marque de Calvados, NDLR) ?

M.B. :C'est en effet une tradition, nous sommes la Capitale du Pays d'Auge terroir des meilleurs Calvados. Nous préférons nos petits producteurs locaux.(Pas de bouilleur dans nos sponsors, nous allons remédier à ça).
Nous avons également coutume de fleurir nos artistes féminines.
Le grand Rufus Thomas a reçu une canne en bois de pommier, au pommeau sculpté en tête de chien : clin d'oeil pour sa chanson "Can't get away from this dog".Nos artistes qui ne consomment pas de Calva repartent eux avec un panier garni.
C'est pour cela que notre L.B.F. est apprécié des artistes car nous sommes attentifs à les recevoir dans des conditions chaleureuses

LGDG: Au sujet des partenaires du festival, sont-ils fidèles ou faut-il relancer tous les ans de nouvelles recherches pour boucler le budget ? et la changement de municipalité... ???

M.B. :Nous avons la chance d'avoir des partenaires fidèles, chaque année de nouveaux arrivent mais les anciens sont toujours présents. Je profite pour remercier tous nos partenaires de leur confiance ainsi que nos nombreux bénévoles sans lesquels le L.B.F. ne pourrait exister.
A nous de convaincre la nouvelle municipalité et de donner au L.B.F. la place qu'il mérite dans le paysage culturel Français.
Evitons de hâtive et facile comparaison avec nos voisins de Coutances 'Jazz sous les Pommiers' nous n'avons pas du tout les mêmes moyens financiers et humains (rapport de 1 à 10) ce qui explique leur communication importante et donc une notoriété nettement plus forte.

LGDG: Je pense qu'en dix ans de Festival, il te reste un bon souvenir ou une anecdote sévère. Peux tu nous la confier ?

M.B. :Je pourrais raconter pendant des heures des souvenirs sur les 11 Editions. Sans compter l'ancêtre du L.B.F. le 'Jazz Blues Festival' de St Désir de Lisieux (1 soirée / an dans un théâtre antique) pendant 10 ans
Depuis plus de 22 ans chaque édition m'a apporté des masses de plaisir, de contact et de joie.
Quelques grands souvenirs en vrac tout de même: - Le duel guitaristique du regretté Luther Allisson avec son fils -Bernard et leur difficulté à quitter le plateau.
- La disparition de R.L. Burnside entre N.Y et Lisieux.
- L'émotion et les vrai larmes de bonheur de Ruby Wilson.
- La chaleur de John Ellison et son effet sur la gente féminine
- La recherche du regretté Lefty Dizz prenant l'air frais dehors après quelques abus alcoolisés et Liz Mc Comb contrainte de faire patienter le public.
- Les caprices de Screamin jay Hawkins car nous n'avions pas de Seven-Up
- La joie de vivre de Rob Rio.
- Le visage des enfants malades écoutant Chris Lancry ou Joe Beard
- Le Grandissime Medley de Chris Spedding et le gros succès de Lullaby cette année
- Et beaucoup d'autres plus intimes ou irracontables

J'espère ne pas avoir été trop bavard et en conclusion je vous invite à visiter notre jeune site www.lisieuxblues.com. Vous trouverez la fiche de la centaine d'artistes reçus depuis 11 ans par le L.B.F, de nombreuses photos (actuellement plus de 475) des anecdotes, des critiques, une page blues Français, des friandises.
Au-delà de la promotion, il propage ce que je qualifie de « mémoire » du Lisieux Blues Festival l'un des plus anciens festival de Blues européen et un esprit celui du blues.
Vous pouvez également entrer en contact avec nous, nous ferons de notre mieux pour répondre et communiquer plus que dans le passé.
Et si vous ne savez pas que faire début octobre passez nous voir à Lisieux c'est seulement 180Km de Paris, le coin est chouette, ont y mange correct, contrairement à une légende il ne pleut pas toujours et nous partagerons notre soif de blues.

Blues'ment Votre
Michel Batrel

Site Officiel : www.lisieuxblues.com
Michel Batrel (Coordination/programmation : michelbatrel@lisieuxblues.com
Jazz Calva Blues (production) JCB@lisieuxblues.com
Lisieux Blues Développement LBD@lisieuxblues.com
Webmestre & relations extérieures webmestre@lisieuxblues.com
Liste de diffusion/informations postmaster@lisieuxblues.com

propos reccueillis par e-mail en Mai 2001 par Jérôme Travers

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Memphis In The Morning
Mem Shannon
a unique blues storyteller...

cd Meme Shannon

Date: 22 Juin 2001
De: Phil CatFish <Philpretet@aol.com>

Six ans après avoir délaissé son taxi sur un parking, et avec lui une source d'inspiration inépuisable -ses propres clients (!)- Mem Shannon enregistre et coproduit là son quatrième album au fameux Ardent Studio de Memphis, qui a vu passé les gloires du blues et du pop rock des sixties/seventies.(BB King, Dylan, the Doors, Led Zeppelin, ZZ top...)

Inclassable, ce bluesman de New Orleans est original tout comme sa musique qui déconcerte à la première écoute : "my music may not sound like any of the blues most people are used to hearing, but if you pay attention to the words you will hear a "story" (...)".

L'histoire, son histoire, Mem Shannon la raconte lorsqu'il roule du côté de Memphis in the Morning, longue ballade envoûtante en soul blues, évoque sa rencontre avec son maître BB King, et puis...son blues les petits matins calmes dans sa bicoque pour tenter de faire sa place au soleil...

Ce long voyage intérieur est valorisé par un enregistrement et une production sans faille de Denis Walker : technique son irréprochable, guitare fluide, timbre de voix feutré et suave, (qui fait penser aux productions Malacoo du chiltin' circuit) mixé notamment sur des orchestrations et des arrangements de cuivres ciselés et interprétés par Wayne jackson et Andrew Love des Memphis Horns.(Drowning On My Feet, Why I Sing The Blues, Memphis In The Morning, Doing The Best That I Can...).

Du bel ouvrage sur lequel on retrouve l'atmosphère et les sonorités musicales du New Orleans et Memphis Blues en passant par les ballades soul (Tired Arms, Unconditionnal Love..) rythm'n'blues et toujours aussi funky (SUV, Invisible Man..)

Laissez vous tenter par ce storyteller dont l'excellent et nouvel album arrive à point nommer pour avaler les kilomètres de la période estivale et au-delà sur la longue route du soul blues.... (:-)

ref CD:Mem Shannon, Memphis In The Morning, Shanachie 9031

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Benoît Blue Boy
En Amérique

Date: 29 Juin 2001
De: Uncle Lee <stagolee@club-internet.fr>

Benoit Blue Boy en Amérique Notre Blues Boy hexagonal (on se comprend) est allé en Amérique et nous a ramené une belle galette à la sauce "Red Devil" enregistrée à Austin en Juillet 2000. Il aura fallu presque un an pour voir sortir ce disque, sous le label Frémeaux Associés qui en profite d'ailleurs (bonne idée!) pour ressortir deux autres albums de Benoît Blue Boy : Parlez-vous Français? et Plus Tard Dans La Soirée. L'été sera Blue Boy!

Dans ce nouveau CD, "Benoît Blue Boy en Amérique", le groupe n'est pas les Tortilleurs (son groupe habituel), mais des musiciens du cru, d'Austin et de San Antonio : Unk John Turner (dr), Pierre Pitou Pellegrin (basse, un français installé à Austin), Hector l'Arana Watt (g, l'araignée qui tisse sa toile sur le manche de sa guitare), Mark Goodwin (piano, orgue), JJ Barerra (basse), Randy Garibay (g, voc), Duke Anthony (dr), Jack Barber (basse), Don Leady (g, steel g, accordéon) et les cuivres quasi-omniprésents et pêchus, donnant le "son" du disque, des West Side Horns : Eracleo Rocky Morales (sax ténor), Adalberto Al Gomez Jr (trompette).

Ca fait du monde, tous ces musiciens que BBB a invité ! Ce dernier assure bien sûr le chant et l'harmonica, instrument qu'il manie avec toujours autant d'intelligence, loin des démonstrations de vélocité, et se fait même discret au profit des autres instruments leads: cuivres et guitare (que BBB joue d'ailleurs sur plusieurs titres). Car on le sent, Benoît Blue Boy s'est fait plaisir en enregistrant ce disque, allant puiser dans les racines de sa musique.

Il signe tous les titres et il n'y a rien à jeter! Textes typiques du personnage, juste des mots simples qui nous touchent .

En route sur les routes du Sud des U.S.A. avec le très balançant C'est Moi Qui Tient Le Volant! Roule Benoît, roule!
Du rire, avec le superbe et très marécageux Swamp Blues Hey Toi où BBB simule (?) très bien l'élocution de fin de nuit…
Des larmes, avec la traînante ballade louisianaise Toujours Demain : "Allez viens le chien… Y a personne…"… gloups…
De l'amour dans T'Es La Seule, Rythm'n'Blues Chicano dont les paroles sont du Grand BBB, faisant le lien entre les incantations des griots africains et la méthode Coué !
"Et maintenant : un rock" annonce le pédagogue BBB avant d'entamer le très rockabilly J'Suis Pas l'Homme qu'il te Faut.
Il y a aussi du vrai blues cuivré (Tu Sais Rien), du blues New-Orleans (ah les cuivres et la guitare de J'entends Ton Taxi Qu'Arrive!), du Texas Blues (l'instrumental 10h1/2 à Chez Nous, le titre le moins indispensable), du Zydeco (Rentrer Chez Moi), et encore du Rythm'n'Blues Chicano (le duo hispano-francophone Blues En La Noche) ou de la Soul (avec le titre phare du disque : Gare Ta Voiture Dans L'Allée).
Le hit absolu du disque, c'est le rock'n'roll cajun Tous Les Jours au riff d'harmonica "évident" qui me fait penser au titre de Johnny Sansone repris par les Doo The Doo dans leur dernier disque. A siffler sans modération et à toute occasion, ce que fait d'ailleurs le bassiste!

Oui, Benoît Blue Boy, personnage incontournable du blues en France par ses nombreux disques, par sa présence sur les scènes blues et par le soutien qu'il apporte aux groupes nationaux nous a concocté là un disque "événement" qui convaincra les plus réticents, si il en reste...

réf CD: Benoît Blue Boy en Amérique, La Lichère/Frémeaux Associés, LLL298, 2001

 

De Patrice Champarou : (de retour de la "nuit du blues" de Ris-Orangis, Janvier 2001)

[...] Nom d'un chien! Je m'asseois sur un strapontin, là juste en face, campé comme Howlin' Wolf au milieu de la scène, ce type avec sa bedaine recouverte d'une chemise blanche qui pendouille sur un pantalon de pyjama... serait-ce lui; Benoît Blue Boy?
Est-ce que je l'ai déjà entendu, je ne sais plus. Oui, certainement, il y a longtemps, une voix nettement plus jeune qui chantait des textes en français.... cela m'avait plu, c'est tout ce que je me rappelle, mais comment ai-je pu oublier un tel jeu d'harmonica?
Ça ne peut être que lui, car d'un coup c'est comme si tout se réveillait. Cette présence scénique sans artifice, ces paroles indistinctes mais complètement intégrées à la mélodie, cette voix qui communique tout en force mais sans jamais forcer, et ce jeu superbe...
Ben oui, amplifié, puis acoustique, tout le monde se tait et c'est tout simplement du blues, donc de la musique. S'il y a un héritier de Williamson, il est là devant nous!
Je "mange" le son de l'harmonica, je ne saurais pas faire le tiers de ce qu'il fait mais on parle le même langage, et je suis totalement avec lui sur la scène. C'est marrant, à l'harmo on a tous cette position tordue, les épaules rentrées, la tête baissée et les coudes écartés au maximum, je me demande toujours pourquoi. Je sens chaque inflexion comme si je l'avais sous la langue, au fond du diaphragme, au creux des mains. Tout coule de source, chaque note est modelée et pas une seule ne s'écarte du blues...
je me rappelle à présent cette formule d'un pianiste qui comparait Bach à Debussy, "beaucoup de musique, et si peu de notes".
Tiens, un tout petit coup de tirette, juste pour faire un effet de mordant! Est-ce possible? J'écarquille mes petits yeux faiblards : ah ben oui, il utilise un chromatique, et pourtant rien de ce que j'ai entendu jusqu'à présent ne s'écartait du jeu le plus orthodoxe. Ici, troisième position, comme sur un gros diatonique...

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Eddie Boyd et Peter Green
"7936 South Rhodes"

Date: 8 Juin 2001
De: Ben "Planet Harmonica" Felten <ben@planetharmonica.com>

CD

Par divers moyens que je ne vous décrirais pas je me suis procuré le fameux Eddie Boyd avec Peter Green de 1968 intitulé "7936 South Rhodes". Je l'ai écouté ce matin on my way to work, et je dois dire que c'est du très bon...

Peter Green fait encore une fois montre de ce qui lui a valu l'admiration des guitaristes de blues noir à savoir une finesse et une maîtrise du silence qui feraient pâlir d'envie les bluesrockers boutonneux des années 90. On entend très nettement une influence des Buddy Guy et des BB King de l'époque, mais Peter Green a son propre son, et c'est superbe.

Ce qui n'est pas pour dénigrer Eddie Boyd lui-même. Je connaissais peu Eddie Boyd et essentiellement comme étant l'auteur de "Five Long Years" mais pas vraiment comme interprête (les morceaux dans le coffret AFBF 62-65 ne m'avaient pas époustouflé à l'époque où je les ai écoutés). Pour une raison obscure, je croyais d'ailleurs qu'il jouait essentiellement de l'orgue (il doit en jouer sur lesdits morceaux).

Eddie Boyd est donc au piano, et en verve au chant. Ce n'est pas un pianiste de la stature de Spann, mais il sait néanmoins varier assez son jeu pour ne pas sonner trop Barrelhouse et parfois accompagner ou imprimer des enchaînements jazzy du plus bel effet. Bref, du bon quoi. Qui plus est le disque est constitué exclusivement de compositions d'Eddie Boyd, et j'ai été surpris d'y retrouver un "Third Degree" que je connaissais joué et chanté par Johnny Winter.

Pour finir sur cet album, je crois qu'il ravira les fans de blues "chess" même s'il n'en est pas, car la finesse des Fleetwood Mac en accompagnement est surprenante de maturité et d'écoute. John McVie à la basse est vraiment exceptionnel, osant pousser au-delà des lignes de basses ultra-classiques du blues "chess" ce qui crée quelques tensions et harmonies du plus bel effet, mais qui restent subtiles. Le seul bassiste qui m'avait impressioné à ce point sur des enregistrements de "classic" blues était Duck Dunn sur la partie studio de "Fathers and Sons".

Enfin, pour clore ma position sur les remarques qui ont suscité mon "acquisition" de cet album, une petite comparaison entre ce "7936 South Rhodes" et le "Biggest Thing Since Colossus" de Spann : Le premier est de toute évidence un album plus solide, mieux enregistré et beaucoup plus consistant. Par moments, il y manque toutefois à mon goût une flamme, une énergie un peu plus brute qu'on retrouve sur quelques morceaux du Spann, en particulier au niveau du jeu de Peter Green et de la voix de Spann. Par contre, "Biggest Thing Since Colossus" est beaucoup moins homogène et comporte de vrais déchets, ce qui n'est pas le cas de "7936 South Rhodes".

Je pense que les deux albums valent d'être entendus et ont leurs mérites respectifs. Merci beaucoup à Jean-Michel pour m'avoir fait découvrir celui-ci et pour m'avoir donné envie d'entendre plus de Peter Green de la "grande époque". A quand une compile "blues" du Peter Green pre-1975... Quels seraient (de l'avis de ceux qui le connaissent bien) les titres les plus représentatifs inclure sur la période "Bluesbreakers" puis "Fleetwood Mac" ? Je citerais pour ma part au moins "Black Magic Woman" et "Jumping at Shadows" mais il doit y en avoir d'autres...

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Boogie Town Festival (Bruxelles)
Tee et The Paladins

Date: 13 juin 2001
De: Didier "Don't Forget To Boogie" Van Den Branden <dvandenbranden@swing.be>

Dimanche 10/6, Tee et The Paladins, dans le cadre du Boogie Town Festival à l'Orangerie du Botanique à Bruxelles.

The Paladins vus deux fois déjà à différentes éditions du même festival (87 et 00) avec toujours énormément de plaisir, mais dans des prestations écourtées (timing de festival) et sous chapiteau/hangar (son moyen).
Tee (Marc Thijs) duquel j'avais adoré l'album "this is...TEE" (enregistré et produit par... Thomas Yearsley, bassiste des Paladins) et que je rêvais d'entendre en "live".

Tee s'est présenté avec son groupe composé de lui-même à la guitare et au chant, Wilfried Maes à la batterie, Renaud Lesire à la basse, deux sax: Jan Boekaerts sax bariton et Bies "JB" Biesmans ou Stefan Thaens sax ténor et un organiste dont je n'ai pas retenu le nom (honte sur moi, mais j'ai VRAIMENT un problème avec les noms!).

Look résolument '50, ils nous ont offert une excellente prestation revisitant l'album "this is...TEE" et présentant également quelques morceaux du prochain (qui devrait sortir d'ici octobre, novembre) qui sera, si on en croit les quelques extraits entendus dimanche, de grande qualité. Un son incroyable, mélange de sonorités '50 et d'aujourd'hui, un orgue surprenant mais devenant vite indispensable, les cuivres (sax = cuivres?) swinguant, jazzy, une section rythmique à toute épreuve et surtout, le chant aigu de Tee, plaintif, gémissant, rigolard (clins d'oil au public) et de l'humour.

Au début du dernier morceau de leur set, une petite question aux spectateurs, l'air de rien, "Are you ready for The Paladins?" mettant les choses au point: The Paladins = LA vedette de la soirée!! Un rappel de Tee, seul, a cappella interprétant "All the Time", les instruments mimés avec la bouche et avec les mains "doudoum-doum-doum-doum" (la contrebasse), "taritataa", (la trompette) et fin de la chanson en empoignant Gonzalez sur le côté de la scène pour l'obliger à venir se faire applaudir par le public ravi.

Après une boisson non-alcoolisée (appelez-moi Bob = private joke made in B), The Paladins arrivent sur scène, et débutent le concert assez cool (enfin, ce que l'on peut appeler cool pour les Paladins...). et swing. Puis, en une fois, alors que tout le monde dodeline gentiment de la tête, ils se déchaînent et partent à Mach 5 dans un show époustouflant. Ceux qui n'étaient pas prêts se sont retrouvés sur le c... Les fans, eux, s'y attendaient! (nombreux types gominés, et vêtus de la veste aux couleurs du groupe).

A partir de là, ils ne se sont plus arrêtés. Au propre comme au figuré, enchaînant des morceaux des précédents cd et d'autres du dernier sorti "SLIPPIN' IN" pimentés de quelques "oldies" (ne me demandez pas de noms... ;-)).

Ils étaient en très grande forme, Brian Fahey, le batteur (un vrai métronome, ce mec, incroyable!), Dave Gonzalez qui a développé ce son si reconnaissable, vieux et moderne à la fois, auteurs de soli magiques, toujours bien placés, francs, clairs et évidents de justesse. Enfin, Thomas Yearsley, le bassiste fou, qui transforme sa contrebasse en partenaire (de sexe féminin, évidemment) avec laquelle il danse, se couche dessus, dessous, tourne autour, la fait passer derrière son dos (manquant réellement la flanquer par terre) hurle, trépigne, prie, éclate de rire, oublie les paroles des chansons et "broubel" (baragouine) quelque mots à la place, joue aux ombres chinoises derrière les spots.

Pour les deux derniers, morceaux, ils ont invité Tee à les rejoindre regrettant de ne pas pouvoir accueillir les autres musiciens du groupe. Un Tee gêné, timide comme une jeune fille à son premier bal qui, sur les encouragements répétés de Dave Gonzalez hilare, s'est laissé aller à quelques interventions d'abord hésitantes, puis finalement magnifiques, surtout dans ses réponses aux provocations guitaristiques de Gonzalez.

A la sortie de la salle, près de la porte, Thomas Yearsley, frais et dispos comme s'y de rien n'était, nous a souhaité un bon retour et nous a remercié de notre présence par une chaleureuse poignée de main.

Ce sont des gens pareils qui nous rendent meilleurs (à recopier 100 fois). En conclusion, ruez-vous sur l'album de Tee,et s'il passe près de chez vous allez l'écouter, vous ferez un bon investissement au niveau de votre capital santé! :-))))

En ce qui concerne les cd que je connais des Paladins, JE les trouve inégaux, mais voir le groupe sur scène est un plaisir IMMENSE!

Ah oui, ma soirée n'aurait pas été aussi réussie si je n'avais aperçu Elmore D dans la salle. J'ai été lui serrer la main en lui disant tout le bien que je pense de son formidable cd "Saturday night rub" et lui expliquant les bons moments qu'il m'a fait passer lors de deux concerts auxquels j'ai eu la chance d'assister. Il m'a gentiment remercié et on s'est quitté là, en se promettant un petit courriel. Dommage que je devais m'en aller, quel homme charmant!!
Même conseil que pour Tee, ruez-vous sur son cd "Saturday night rub" et s'il passe près de chez vous, allez l'écouter.

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Festival de la Défense (Paris):
John Hammond

John Hammond, La Défense 2001 (photo Jean Bakrim)

Date: 16 Juin 2001
De: Jocelyn Richez <jrichez@noos.fr>
(photos Jean Bakrim)

Hier soir, j'étais au festival de la défense. La soirée était présentée par Patrick Verbeke toujours très à l'aise pour ce genre de mission. Le temps était incertain mais le public était néanmoins nombreux, certes, le fait que ce soit gratuit doit y être pour quelque chose. Personnellement, le décor du parvis de la défense avec toutes ses tours me parait assez sympa pour ce festival, rappelant un peu le décor du loop à Chicago, dont le festival se déroulait presque en même temps.

J'ai tout d'abord vu Ana Popovic, la chanteuse guitariste venue de Belgrade.
Elle est jeune et charmante et joue dans un registre blues rock souvent plus rock que blues. Elle m'a fait penser à Joanna Connor, physiquement et musicalement (car elle a joué aussi quelques morceaux en slide). Elle est installée aux Pays Bas et joue avec des musiciens hollandais déjà vu lors de tournées Crossraods (Percy Strother, Smokey Wilson...). Elle a assurément de la voix. C'est assez rare de voir une femme jouer dans ce registre de guitar hero ! Certes, j'ai déjà vu beaucoup mieux dans le style mais c'était pas mal pour chauffer le public avant John Hammond.

John Hammond (photo Jean Bakrim) John Hammond, je l'avais vu plusieurs fois notamment au New Morning, et invariablement, il jouait pratiquement toujours les même morceaux, seul à la guitare acoustique ou à la national (la seule exception étant le concert du Hot Brass avec Duke Robillard et Al Copley où il avait fait un set électrique). Cette fois, changement complet, c'est bien en groupe et à la guitare électrique qu'il allait jouer.
Compte tenu de la qualité de ses concerts précédents et de la critique élogieuse de son dernier CD (le pied dans soul bag dont il fait la couverture), c'est avec beaucoup d'enthousiasme que je me suis présenté devant cette scène située à moins de 50 m de mon bureau !
Ca se présentait vraiment bien car comme l'avait annoncé P.Verbeke, il était accompagné par le "gratin", Steven Hodges à la batterie et Larry Taylor à la contrebasse, une section rythmique bien connue des amateurs de blues west coast. John Hammond est apparu un peu fatigué et boitant légèrement mais apparemment ravi d'être à Paris. D'ailleurs, il parle de mieux en mieux notre langue. Il a pour habitude de présenter les morceaux qu'il joue et a fait de gros efforts pour parler le maximum en français. Le concert a duré une bonne heure et demi et il n'a joué que du Tom Waits (ou presque), bref, pour une fois il nous l'a joué "promo du dernier cd" ce qui n'est pas dans ses habitudes. Ne connaissant pas le CD, j'ai découvert les morceaux et leur interprétation sur place. Il a je pense, joué à peu près tout le cd (Clap hands, murder in the red barn, heart attack and vine etc...) et même quelques morceaux (de Tom Waits) qui n'y figurent pas. Au final, je n'ai pas trop accoché aux morceaux de Tom Waits, à cette musique essentiellement rythmique, aux ambiances très sombres et pesantes. Certains morceaux m'ont paru un peu longs et répétitifs. J'ai même espéré, voyant derrière lui une guitare acoustique et une national qu'il jouerait quelques morceaux de son répertoire habituel mais il ne l'a pas fait.

Bref, malgré une petite déception, je ne regrette pas ma soirée espérant même qu'il y en aura beaucoup d'autres qui suivront dans ce décor encore inhabituel et avec autant de public.

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Franck Ash
à Saint Chamond

Date: 11 juin 2001
De: Phil Espeil <philnet@free.fr>

Franck Ash (photo Phil Espeil)
Franck Ash (photo Phil Espeil)
Paramètres de prises de vue:
Focale de 50mm environ.
Vitesse 1/60 - f5.6 sans flash.
Film FUJI Supéria 200ASA sur CANON EOS 500N.
[NDLR: pour les connaisseurs!]
St Chamond est une petite ville entre Lyon et St Etienne. L'autoroute y passe et on ne s'y arrête jamais. Ce soir-là, vendredi, Franck Ash y était et, pour une fois qu'il passait dans la région, je ne pouvais le manquer.

Je suis arrivé en même temps que Franck Ash ce qui m'a permis d'échanger quelques mots avec lui. La salle, L'Encrier, est un petit café-concert en plein milieu de la ZUP de Saint Chamond. A peu près 80 m2 pour accueillir le public et les musiciens. Salle petite donc, le concert promettait d'être convivial. Pour une première (je n'avais jamais écouté le moindre morceau de Franck, pas même des extraits), je ne pouvais rêvais mieux.

Le concert a débuté avec un instrumental (comme j'aime) et a mis tout de suite les choses au clair; ce soir, ce serait blues et guitare, et sans concession. Les morceaux se sont enchaînés, tous plus électriques les uns que les autres, souvent très rythmés, et ont fait l'unanimité auprés du public. Soit dit en passant, le public n'était à mon avis pas des plus faciles à séduire car je doute que beaucoup de monde se soit déplacé pour voir Franck. Les présents (à peine une trentaine) étaient surtout rentrés parce qu'ils erraient dans la cité, qu'il pleuvait, et qu'il y avait de la musique.

Et pourtant, le public a été conquis. Les gens ont dansé, acclamaient le groupe de musiciens, et toutes les exclamations que j'ai pu entendre autour de moi étaient en faveur de Franck. Il a vraiment assuré alors que les conditions n'étaient pas des plus adéquates. Les autres musiciens m'ont aussi beaucoup plu, autant le batteur Christophe Gallizzio, le bassiste Roger Thomas qui est de taille ;-) que le guitariste venu exceptionnellement seconder Franck, Jérémy Tepper .

Pour clore la soirée, Franck a invité un de ses amis présent dans la salle, Mouss (rappelez-vous, Fred & Mouss, il y a quelques années, sur Lyon) à le remplacer au micro pour interpréter "Stand By Me". Pour une première rencontre avec le "beau ténébreux", le concert a été très bon à mon goût. J'ai passé un moment exceptionnel.

Même si Franck m'a confié après le concert qu'il y avait eu beaucoup d'improvisation, ce qu'il semblait regretter un peu, j'ai trouvé le groupe de haute qualité.

Franck Ash, c'est du blues, du vrai, du bon.


PS: Score au StringBreakmeter = 0 ;-)

d'autres (magnifiques) photos de ce concert: www.multimania.com/pespeil/fa/

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Tournée "Fedora 2001"
Iceman Robinson
Little Arthur Duncan
Paris Slim

Date: 19 Juin 2001
De: De: Jocelyn Richez <jrichez@noos.fr>

L'un des événements blues de ce mois de juin 2001 était incontestablement la tournée "Fedora 2001" qui est passée deux semaines durant au Quai du Blues avec Iceman Robinson et Little Arthur Duncan en vedettes mais aussi Franck Goldwasser, plus connu sous le nom de Paris Slim, et le boss Chris Millar.

Autant je connaissais bien Chris Millar, Paris slim et Arthur Duncan qui ont beaucoup tourné en Europe ces dernières années, autant je découvrais comme tout le monde Iceman Robinson, dont c'était la première tournée européenne et dont je ne connaissais que son remarquable CD sorti sur le label Fedora avec un son brut et sans fioritures rappelant un autre guitariste du south side Chicago: Hound dog Taylor.

J'y suis allé le 8 juin et j'ai trouvé le concert tellement fantastique que j'y suis retourné la semaine suivante, le 16 juin. C'est Iceman Robinson qui ouvrait le show au quai du blues avec le premier titre de son cd, "my baby's comin' home" avec une intro digne d'Elmore James: ça partait fort ! Iceman Robinson

La première chose qui m'a frappé, c'est que le son était beaucoup plus soft que sur le CD, plus proche de Tommy Bankhead que de Hound dog. Il enchaîna sur des reprises de BB King ("it's my own fault" et "the thrill is gone"), Albert King ("Crosscut saw") et Muddy Waters ("got my mojo workin'") qu'il interprèta à sa façon. Je me suis rendu compte que ce type n'était pas limité aux shuffle et aux boogie rugueux, mais qu'il pouvait être excellent sur les blues lents où sa sensibilité, voire son émotivité ressortait donnant une rare intensité à ses morceaux. La deuxième chose qui m'a surprise suite à l'écoute du CD est qu'il a très peu utilisé son bottleneck (même pas du tout le 8 juin). Et puis, il convient de souligner la remarquable prestation, à la fois sobre et brillante de Paris Slim à la guitare. Ca ne doit pas être de tout repos que d'accompagner un guitariste aussi imprévisible que Iceman Robinson. Il paraît que ses performances ont été inégales durant la tournée (avec des échos assez mitigés sur sa prestation à Ecaussines), mais, les deux soirs où je l'ai vu, il fut remarquable.
C'est un personnage introverti qui semble même timide (c'est sans doute de là que lui vient son surnom de Iceman - comme Albert Collins !) mais qui est attachant. C'est sûr, il a l'air un peu paumé loin de Chicago et de son train train habituel et contrairement à John Primer vu récemment au méridien qui semblait apprécier son séjour à Paris, Iceman semblait être comme déraciné. Et c'est peut être ce qui lui donnait cette puissance et cette conviction pour chanter le blues quand il était sur la scène du quai du blues.
Je suis allé le féliciter à la fin du concert en lui indiquant que j'espérais le revoir bientôt, et il m'a clairement fait comprendre qu'il n'était pas prêt de revenir (tant pis pour ceux qui l'ont raté !), alors je lui ai dit peut être à Chicago ? et là j'ai vu son visage s'éclairer et il m'a répondu: peut être. Il s'est quand même "un peu lâché" le 8 juin (enfin le 9 vers 2h du mat') en acceptant de danser avec une cliente à la fin du concert.

Le 16 juin, Thibaut Chopin était dans la salle et Paris slim qui le connaissait depuis l'enregistrement du CD "lent ou rapide" de Benoit Blue Boy l'a fait monté sur scène. Et comme il n'avait pas ses harmonicas sur lui, Arthur Duncan lui en a prété un. Mais les harmos d'Arthur Duncan, ils sont pas vraiment tout neufs, et apparemment il manque des cases. Malgré cela, Thibaut Chopin s'en est bien tiré jouant deux morceaux avec Iceman Robinson dont une superbe reprise de "Walking thru the park" de Muddy Waters.

UP Wilson Le 16 juin toujours, il y avait aussi UP Wilson dans la salle, et c'est lui qui a ouvert le second set. Il a bien sûr joué essentiellement à une main (sa grande invention !), ça n'a en fait pas grand intérêt mais il faut reconnaître que de la manière dont il le fait c'est spectaculaire et en plus ça sonne bien, bref encore un bon moment, une parenthèse texane dans cette soirée consacrée au Chicago blues rustique.

Arthur Duncan C'est justement le rustique mais charismatique Arthur Duncan qui montait sur scène pour la deuxième moitié des sets. Little Arthur Duncan, je l'ai découvert en novembre 1999 à la blues estafette à Utrecht (voir http://mapage.noos.fr/jrichez/Utrecht.html) dont il avait été l'une des révélations, il a une dégaine infernale, une façon de danser spectaculaire à défaut d'être élégante qui le font immédiatement remarquer. C'est un chanteur à la voix puissante, un hurleur à la manière d'Howling Wolf qui doit être un de ses modèles. C'est encore plus évident lorsqu'il interprète des morceaux du wolf comme "How many more years". Côté jeu d'harmonica, malgré une technique rudimentaire, il arrive à capter l'attention et à demeurer toujours intéressant. Au total, son blues est un métissage entre le delta blues (il est originaire d'Indianola dans le delta) et le Chicago blues (il vie depuis longtemps à Chicago), un mélange entre ses origines rurales et sa vie urbaine actuelle. Son premier CD sur le label Delmark "singin' with the sun" était excellent mais c'est sur scène qu'il est vraiment le meilleur comme le prouve son deuxième CD, le "live au Famous Dave à Chicago". Et c'est ce répertoire qu'il a interprété au quai du blues. Au passage, je parierais bien que le prochain CD d'Arthur Duncan sortira chez Fedora.
En tout cas, "singin' with the sun" lui a valu une nomination aux Handy Awards 2001 dans la catégorie "comeback blues album of the year" et il en est apparemment très fier. Quand je lui en ai parlé, il est immédiatement parti chercher le fameux diplôme encadré, et on a fait quelques photos. Arthur Duncan est vraiment un type sympa, simple et abordable. Un moment inoubliable ! (Pour info, c'est finalement Mel Brown qui a remporté l'Handy Award).

Le 8 juin, on a eu droit à un boeuf final avec Arthur Duncan et Iceman Robinson ensemble en apothéose d'une superbe soirée. Il me reste à remercier Chris Millar, batteur de la tournée et big boss du label Fedora d'avoir réuni et fait tourner des bluesmen comme il n'en existe malheureusement plus beaucoup pour vivre des soirées au parfum de south side Chicago même si Neuilly est loin du ghetto et que le quai du blues n'a pas grand chose à voir avec le Checkerboard Lounge.

En conclusion, je me suis encore rendu compte que ce ne sont pas les plus grands techniciens qui me donnent le plus de plaisir et d'émotions, Iceman Robinson étant pour moi l'une des deux grandes révélations blues de ce premier semestre 2001 avec D.C. Bellamy.

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Concert au Trabendo:
Buddy Guy
(Sweet Tea: suite)

Date: 14 Juin 2001
De: Benoît "Planet Harmonica" Felten <ben@planetharmonica.com>

On en avait parlé sur LGDG depuis la sortie de "Sweet Tea" (voir LGDG n° 32), les concerts de Buddy Guy ne sont pas des valeurs sûres. Disons, pour ceux qui ne l'ont jamais vu, que Buddy Guy a beaucoup d'atouts dans sa manche : il a une indéniable présence scénique, il est capable d'un showmanship extraordinaire, il joue d'une manière extrêmement dynamique, il est un chanteur de tout premier ordre, et, last but not least, il sait s'entourer de bons musiciens qu'il mène à la baguette (ou plutôt au clin d'oeil). Malheureusement, tous ces atouts se retournent parfois contre lui, lorsqu'il ne sait pas les doser et que le showman prend le pas sur le musicien.

Ce n'est donc pas sans une certaine appréhension que je me suis rendu hier soir au Trabendo avec notre Christophe Godel Greenwoodien et Patrick, un de ses collègues "novice" en blues. Les deux derniers concerts de Buddy auxquels j'ai pu assister n'étaient pas du meilleur effet, contrairement au premier qui reste dans ma mémoire comme une des grandes expériences scéniques et musicales auxquelles il m'ait été donné d'assister.

Le Trabendo lui-même n'est certes pas une salle très chaleureuse mais a le mérite d'être de dimensions modestes et agencé de telle manière qu'on est jamais très loin de la scéne, qui par chance n'est pas trop surélevée. La configuration de la salle combinée au fait que Christophe (qui était arrivé plus tôt que moi) avait entendu un saxo faire la balance regonflait un peu mon optimisme sur ce concert. En attendant Buddy, Christophe, Patrick et moi-même faisions connaissance autour d'un gobelet de Perrier / Coca à 18F. Aaah, les concerts, c'est chouette ;-)

Vers 21h00, Buddy arrive sur scène sous les vivats. La salle est bien pleine sans être pour autant comble, on peut respirer et le public a l'air d'être en forme. Buddy attaque le concert avec un morceau du dernier album, peut-être "Look what all you got". En tous cas, ça bouge, Buddy a l'air en forme, et le groupe est brand new, seul Tony Z est encore là. Le reste (batteur, bassiste, guitariste rythmique et saxophoniste tenor) ne sont que des jeunes, tous super compétents.

Je ne vais pas vous raconter le concert par le menu, mais c'était vraiment un super concert. Buddy n'a joué pratiquement que ses propres chansons, ou en tous cas des chansons qui figurent sur ses albums. Il y a eu un court Hoochie/Coochie Man > Love her with a Feeling et deux courtes imitations (John Lee Hooker mais pas Boom Boom, In the Mood) et BB King qui n'était pas une imitation, juste une reprise de "Sweet Black Angel". Buddy a joué des versions superbes de "My time after awhile", il a même pris son acoustique pour jouer "Done Got Old" qu'il a suivi d'un slow blues visiblement imprévu (le groupe a flippé un instant ;-) mais absolument superbe à la sèche, Buddy échangeant des riffs bluesy avec le sax tenor. Superbe.

Les dérives qu'on a pu constater par le passé étaient bien maintenues en laisse ce qui les rendait efficaces. Ainsi, Buddy a concentré tous ses "tricks" de showman sur un morceau, "Tramp", entre les manières bizarres de jouer de la gratte et une longue sortie dans la foule. Du coup ça gardait son côté exceptionnel et ça amenait une super ambiance. Le groupe de Buddy était plutôt en retrait, chaque soliste a eu droit a un solo dans la soirée (la palme allant au sax tenor sur "My Time after Awhile", il me semble). Tony Z a gâché son opportunité en utilisant encore son pitch bender de clavier...

Bref, c'était un super show. Seul regret, vers 22h30 Buddy est sorti de scéne et n'a pas fait d'encore. Mais c'était une petite déception par rapport à un concert vraiment super.

Jocelyn, tu es devenu le stage manager de Buddy ou tes prières ont simplement été entendues ? En tous cas je pense que tu aurais apprécié !

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Masters of the guitar
la Soirée Blues
Louisiana Red, Karim Albert Kook, Popa Chubby, BB King

Date: vendredi 29 juin 2001
De: Tof' Godel <christophe.godel@freesbee.fr>

En ce mardi 26 juin 2001, la canicule faisait rage sur Paris pour accueillir 4 artistes au Palais des Congrès pour les Masters of the guitar, soirée Blues. Pour ce festival, il y aura eu 4 soirées, dont une exclusivement blues, afin récolter des fonds pour diverses organisations, dont Polio Plus, ROTARY INTERNATIONAL avec l'UNICEF, l'OMS et la Fondation de l'ONU. Cette soirée était également l'occasion de rendre un nouvel hommage à John Lee Hooker, décédé vendredi 22 juin.

Le concert débuta par Louisiana Red, seul. Comme souvent, on commence la soirée par du Country Blues. Un Louisiana Red courbé par les années, avec un certain dynamisme, entama quelques titres de son dernier album et un hommage à JLH, son oncle. Il délaissa son Dobro pour quelques titres électriques, façon Chicago puis Mississippi sound. Après une toute petite demi-heure, il salua le public. A peine le temps de se mettre dans l'ambiance qu'il commençait à créer ! Vraiment dommage !

Il fallait enchaîner avec la suite. La suite c'était le seul représentant français de la soirée, Karim Albert Kook. Lui même atteint de la poliomélite, c'est avec toute logique qu'il fût invité. Entouré de 3 choristes, un batteur, un bassiste, un pianiste, un guitariste (excellent) et les cuivres du Bone's Project de Boney Fields (Boney Fields, trompette, Nadège Dumas, saxo, et Pierre, trombonne). Début difficile pour lui car son ampli de guitare n'était pas branché correctement, les réglages ne semblaient pas convenir. Les cuivres du Bone's Project étaient à peine amplifiés. Karim nous joua les titres de son dernier album (Je roule vers toi), essayant de faire vibrer un public un peu attentiste, pas toujours coopératif. Karim n'a pas été très démonstratif sur son jeu de guitare (quand on arrivait à l'entendre).
Je pense l'avoir vu meilleur que cela. Les conditions n'étaient peut-être pas optimales. Après une petite heure de concert, vivante et rythmée, mais parfois un peu convenu, Patrick Verbeke rejoignit son ami sur scène.
Finalement, si on doit en croire la standing ovation auquel il a eu droit à la fin, il a réussi à séduire une bonne partie d'un public timoré, parfois stoïque. Je pense que Karim peut être bien meilleur que ce qu'il a présenté ce soir là. Mais en tout cas, j'adore la façon avec laquelle il arrive à faire vibrer les mots français sur le blues. C'est assez rare pour le souligner !

Rapidement la scène fût dégagée. Il fallait enchaîner avec le dernier artiste de la première partie, à savoir Popa Chubby. What time is it ? It's chubby time disait un de ces titres ! Ca n'a pas loupé. Accompagné de son batteur et bassiste habituelle, plus un pianiste d'une énergie et d'un talent rare, il a retourné la salle du Palais des Congrès en un titre, un seul. Subjugué, conquis, charmé, heureux d'entendre enfin quelques envolées lyriques à la guitare, le public termina ce premier titre debout ! Un Popa en pleine forme distilla ses notes bleues puissantes teintées de rock pendant près d'une heure un quart, plus un rappel et quelques standing ovation, mais aussi des reprises 60's et 70's (Gloria, Hey Joe entre autre), et le si controversé titre de son dernier album How'd a white boy got the blues. Bon nombre de spectateurs découvrait ce performer. Popa Chubby fait couler beaucoup d'encre au sein de la communauté blues, notamment sur La Gazette. Popa Chubby, est-ce du blues?
Personnellement, j'adhère toujours, j'adore toujours. Je dirais que Popa Chubby c'est entre autre du blues, et il arrive à le décloisonner parfois. Je vais le citer (tiré de First Cuts) :
"I ain't no pure. No one is. I'm a crosscut bastard mixed up and made up for every lick that ever floated through my brain. This record reflects that. I assimilated my influences without denying any of them. I'm becoming myself. The rock'n'roll is pouring out. The punk is loose. The blues won't be denied. The music is everywhere I've been and everywhere I want to go."
Je persiste à dire que Popa Chubby est un véritable lien entre le blues plus classique et les fans de rock et de guitar hero. Et tant mieux si ça peut les amener vers d'autres notes bleues.

Et les notes bleues qui allaient suivre étaient signées par certainement l'une des toutes dernières légendes du Blues, BB King. Le public était avant tout venu pour lui. Certains se demandaient ce que ça pouvait donner derrière le succès rencontré par Popa Chubby. C'est BB King... Malgré ses 76 ans, et une fatigue plus marquée que la dernière fois où je l'ai vu, en 1998, il reste un personnage attachant, doué de ce toucher si magique, et avec une voix plus Blues que jamais. Il joua un peu plus d'une heure trente, faisant swinguer la salle, la faisant rire. Le passage que je préfère reste celui où les cuivres et claviers délaissent la scène, pour le laisser mener son blues comme il l'entend, avec les grands classiques comme Thrill is Gone, que je ne me lasse jamais d'entendre. Un concert de BB King a tendance à se ressembler bien sûr d'une année sur l'autre, mais c'est bien rodé, ça tient la route, c'est impeccable.
Quelques titres changent ici ou là. Le public a répondu présent à BB King et avec ferveur. A 1h du matin, le King of the blues a quitté les lieux sous une standing ovation.

Je tiens quand même à signaler que la sonorisation n'était pas terrible. Les artistes ont dû subir des larsens, des micros disfonctionnants, des amplis débranchés, des réglages sonores foireux, des cuivres à peine amplifiés sauf quand ils prenaient des solos, et j'en passe. Je n'ai jamais aussi souvent vu des roadies et des ingénieurs du on aller et venir sur scène pendant un concert ! Et vu le prix de certaines places, c'est assez regrettable !

On peut aussi indiquer que les "molosses" de la sécurité n'étaient pas très sympathiques ou ouverts. Dés que des gens s'approchaient de la scène, debout pour applaudir tel ou tel artiste, ils accouraient pour les faire reculer ! (Il n'y avait que des places assises). Dés le début du show de BB King, les gens ont commencé à squatter les escaliers menant près de la scène. Ils empêchaient les gens d'avancer. Ils furent logiquement débordés tout à la fin, mais ils insistèrent. Ils avaient peut être peur que le public se mettent à slammer sur "Let the good times roll"!!!

Pourtant, le public fût lent à se lâcher. Il faut dire qu'il n'y avait pas que des habitués de la musique du diable. Beaucoup était là parce que BB King venait. Du coup le public avait un petit côté "bourgeois jazzy stoïque" assez marqué. Ca faisait un mélange étrange, mais qui a bien pris finalement dés le dernier titre de Karim Albert Kook.

Tous les artistes, excepté BB King, rendirent hommage à John Lee Hooker, en reprenant ou en lui dédiant un morceau. Je m'attendais à un petit quelque chose de BB King, mais ce ne fût pas le cas.

Dehors la canicule avait fait place à un déluge saisissant. Mais on s'en moquait pas mal, on avait du blues plein la tête.

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