La Gazette de GREENWOOD
n°41 (Avril 2002)

  
Tome 1
Tome 2
  • interview: Marvellous Pig Noise, Louise & Anne en Louisiane
  • interview: Delta Blues, si tu n'as rien à dire, chante en Anglais...
Suivez la (bonne) étoile verte: si un nom est suivi de , cliquez sur l'étoile pour plus d'informations.

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interview:

les Rosebud
Blue' Sauce

Rosebud Blue Sauce (photo Jocelyn Richez)



C'est à Cahors, à l'occasion de la Nuit du Blues organisée par l'association Blues & Co que Jocelyn Richez a rencontré et interviewé les Rosebud Blue' Sauce. Il avait découvert ce groupe qui joue un blues west coast au festival de Cognac cet été [voir LGDG n°34 bis], ce fut le coup de foudre!

date: 6 Février 2002
de: Jocelyn Richez <jrichez@noos.fr>
(photos de l'auteur)

Nicolas Duportal
Nicolas Duportal
LGDG: tout d'abord, pouvez vous vous présenter?

Nicolas Duportal: on s'appelle Rosebud Blue' Sauce, on joue du blues à tendance west coast, mais maintenant aussi à tendance Chicago avec Denis à l'harmo.
J'ai fait un an de guitare classique quand j'étais jeune (7 ou 8 ans), je jouais du Narcico Yepes mais comme j'étais très jeune, ça ne m'a pas tenté plus que ça, c'était mon père qui m'avait un peu forcé. J'ai ensuite repris il y a à peu près 7 ans et là, je voulais faire du blues. Je m'étais dit: si je refais de la musique, c'est pour jouer du blues.

Denis Flaichez: Moi, je me suis acheté mon premier harmo à l'âge de 20 ans, je vais avoir 30 ans le mois prochain, c'était mon premier instrument. J'aime le blues ! J'ai fait plein de boulots jusqu'à il y a environ 3 ans et je me suis dit: je vais bosser un peu plus l'harmo et j'ai fait partie d'un groupe qui s'appelait "caféine et nicotine", on jouait à la "mano-négra" à Bayonne qui est un club où il y a du blues tous les mercredis, un endroit vraiment super, on a animé des jam sessions là bas pendant un an puis j'ai joué tout l'été et à la fin de l'été, j'ai rejoint Rosebud Blue' Sauce, juste après Cognac.

Abdell Bouyousfi: j'ai commencé par la basse en 1991, j'avais 20 ans, je jouais dans un groupe alternatif rock, country punk. Ensuite, j'ai joué pendant 3 ans et demi dans un groupe cajun zydeco puis j'ai rencontré Nico et on a monté Rosebud Blue' Sauce et donc je fais de la contrebasse depuis 3 ans.

Fabrice Bony: j'ai commencé la batterie à l'âge de 6 ans par l'intermédiaire de mon père qui était musicien et qui m'a donné le virus –il jouait de la guitare dans les bals – après j'ai pris des cours puis en 1991, j'ai travaillé avec Rod de Rod & the shotgun blues, à l'époque ça s'appelait juste shotgun blues, j'ai bossé pendant 3 ans avec lui et après j'ai eu une opportunité, j'ai passé une audition avec le groupe Ange (c'était pas du blues, plutôt du rock progressif) et j'ai fait une tournée avec eux en 1993, ça a duré un an, j'avais 22 ans à l'époque (j'en ai maintenant 31). Je suis ensuite reparti avec Rod puis j'ai tourné avec Tomcat Blake, c'est un américain qui vie en France qui joue du blues avec un peu de rockab' et après avec Quicksilver blues band en 1994, un groupe d'Ardèche. Ensuite, je me suis installé sur Toulouse et j'ai joué avec d'autres gens et pour finir, j'ai intégré Rosebud Blue' Sauce en mai 2001.

Denis Flaichez
Denis Flaichez
LGDG: Quel est la signification du nom "Rosebud blue Sauce" ?

Nico: Rosebud, c'est une vallée aux Etats Unis, c'est un endroit que j'aime bien. Au début, on s'est appelé juste Rosebud mais il y avait un autre groupe qui faisait une musique complètement différente du blues qui s'appelait Rosebud alors avec Abdell, on a décidé de modifier un peu le nom et on n'a pas voulu s'appeler Rosebud Blues Band parce qu'on trouvait que tous les groupes de blues s'appelaient … Blues Band, et comme on commençait à partir sur des trucs assez jump, assez west coast, on s'est dit pourquoi pas Blue' Sauce, c'est sympatique, voilà, ça veut un peu rien dire !!!

LGDG: D'où vient ton surnom de Nico "teen" ?

Nico: ça vient d'un voyage dans le Dakota du sud en 1997. C'est un ami de là bas qui m'a donné ce surnom. Quand on s'est rencontré, il m'a demandé mon prénom, je lui ai dit: je m'appelle Nico et puis au fil des jours, il voyait que je fumais beaucoup, et il m'a appelé Nico "teen", pour la nicotine: c'est un jeu de mot; ils ont un humour bien particulier, souvent, ça ne fait rire qu'eux mais là ça m'a fait rire moi aussi !
C'est un truc qui est resté.
Et puis, j'étais plus teenager que maintenant (il a 26 ans) – c'était avant Rosebud- mais je ne sais pas si je vais garder sur surnom car je vais arriver à 30 ans et teen ça va plus le faire !

LGDG: Sur la démo 4 titres, vous avez enregistré Dimples de John Lee Hooker, c'était avant sa mort ou était ce un hommage posthume ?

Nico: c'était bien avant, c'était un hommage mais pas posthume. C'est vrai que c'est un morceau que l'on joue de moins en moins souvent. La démo a été enregistrée fin 2000, à l'époque, on était en trio et avec Abdell on faisait beaucoup de gigs à 2 (contrebasse / dobro) avec un répertoire assez delta et quand on pouvait, on tournait avec un batteur – c'était le premier Rosebud Blue' Sauce. On voulait faire un album - qu'on voulait déjà à l'époque appeler "first jump" – on l'a enregistré mais on n'a pas pu concrétisé pour diverses raisons, enfin c'est jamais sorti.

Abdell Bouyousfi
Abdell Bouyousfi
LGDG: il existe donc plein d'inédits ?

Nico: oui, il y a plein de morceaux…mais il y a un décalage par rapport à ce qu'est la formation maintenant avec l'arrivée de Fabrice qui est avec nous depuis le mois de mai et ensuite - j'y tenais beaucoup depuis longtemps – l'arrivée de Denis dans le groupe.

LGDG: sur la démo, il y avait aussi "you don't have to go" de Jimmy Reed qui est assez roots, ce qui veut dire qu'au départ, Rosebud Blue' Sauce n'était pas uniquement un groupe de west coast ?

Nico: Mais même dans le répertoire actuel, il n'y a pas que du west coast. On compose dans le style west coast, c'est vrai, mais les compos, c'est venu comme ça, on ne s'est pas dit, on va faire un groupe west coast. On avait envie de jouer ces trucs là mais pour ma part, j'aime aussi le Chicago et le delta.

Denis: on aime tous les styles de blues en fait.

LGDG: sur le cd, on ne retrouve qu'un seul morceau de la démo et en plus il a été ré-enregistré, pourquoi ?

Nico: c'est "treat me with honesty", une de nos premières compositions avec Abdell, c'est un morceau bien jump influencé pas mal dans l'esprit par le Hollywood Fats Band, qu'on avait enregistré sur la démo. On a vraiment tenu à réenregistrer ce morceau avec l'arrivée de Denis à l'harmonica. Il nous tardait de voir ce que l'harmonica allait donner sur nos morceaux.

LGDG: qui compose dans le groupe ?

Nico: jusqu'à maintenant, c'est Abdell et moi même. On a des idées. Abdell habite à la campagne, j'habite pas très loin de chez lui, souvent j'allais chez lui, on travaillait à notre rythme, on boeuffait et parfois on disait ce serait intéressant de parler de ça sur cette musique. Et maintenant, on est 4, on est un vrai groupe; depuis l'après Cognac, les compos, c'est un travail de quatuor

LGDG: justement, vous avez des origines géographiques un peu éloignées entre Cahors (Nico et Abdell) Toulouse (Fabrice) et Bayonne (Denis), alors comment faites vous ?

Nico: on est un vrai groupe west coast !!!
On est tous dispersés dans le sud ouest de la France.

Fabrice Bony
Fabrice Bony
LGDG: pouvez vous quand même répéter quotidiennement ?

Nico: non, pas quotidiennement !
mais on joue tout le temps…

LGDG: je remarque que toutes les compos sont en anglais, c'est un choix délibéré ? Est ce que tu penses que le Français, ce n'est pas la langue du blues ?

Nico: non, je n'ai pas d'à priori comme ça. Moi, je n'arriverai pas à chanter un texte blues en Français. Je ne me sens pas assez fort pour chanter des textes de blues en Français…

LGDG: est ce envisageable dans le futur ?

Nico: Denis a ses petit projets là dessus

Denis: oui, j'ai des envies; on verra aux répets si ça sonne, si ça vaut le coup de faire ça et si ça plaît à tout le monde.

Nico: La démarche n'est pas: on va faire un truc en français parce qu'il faut faire un truc en Français ou alors: tiens, il faut continuer de composer en anglais parce que c'est la langue du blues. Ca ne se passe pas comme ça, c'est selon ce qui vient. Je sais que Denis a plein de choses en tête.
Là tu vois, on a écrit une chanson qui s'appelle "gare ta voiture dans l'allée"… (rires)
Tu vois, il y a des gens qui le font très bien, évidemment, Benoit, c'est le bon exemple !

LGDG: Comment avez vous fait pour trouver un label ?

Nico: c'est par le biais de Francis Rateau de Blues & Co que ça s'est fait. Il nous avait vu à Cognac et il avait aimé le concert. Il m'a appelé, m'a dit qu'il connaissait un label indépendant qui aime plein de choses, plein de musiques différentes; il nous a dit: pourquoi pas essayer ? alors j'ai envoyé la démo 4 titres en trio et 2 mois après, le gars du label outside records m'a rappelé et m'a laissé un message –on était en studio, on finissait tout juste l'enregistrement du cd – j'ai interrogé le répondeur et il avait laissé un message disant qu'il souhaitait travailler avec nous. On s'est rappelé et puis voilà !

LGDG: Le financement du cd a été difficile, puisque ça t'a obligé à vendre ta guitare… (la fameuse De Armond X155 qu'on a vu à Cognac)

Nico: oui…

LGDG: ça a dû te faire mal au cœur ?

Nico: oui, c'est toujours embêtant de vendre une guitare mais j'en ai racheté une depuis.

LGDG: Tu as racheté la même ?

Nico: non, je n'ai pas repris la même, elle m'a coûté un peu plus cher celle là ! C'est une Gibson ES 330 de 1964. On commence tout juste à se connaître…

LGDG: tu joueras avec tout à l'heure au concert ?

Nico: oui, oui !

Rosebud Blue Sauce LGDG: sur le CD, il y a deux morceaux "all this blues" et "Fats'ology" où tu affiches clairement tes influences ?

Nico: dans "all this blues", je cite Muddy (Waters), Buddy (Guy) et Pee Wee (Crayton), il y a plein de gens comme ça qui m'ont influencé, c'est un petit hommage à tous ces gens du blues assez différents. Muddy Waters notamment.

LGDG: ce sont des gens qui t'ont beaucoup marqué ?

Nico: moi, ce sont des gens qui me marquent tous les jours. Tous les matins quand je me lève, il y a automatiquement ces gens là qui passent sur ma platine.

LGDG: pour Pee Wee Crayton et Hollywood Fats, l'influence est évidente, par contre pour Muddy Waters et Buddy Guy, ça saute moins aux yeux…

Nico: non, non ! Willie Dixon, c'est le blues ! j'adore les vieux enregistrements de Muddy Waters sur Chess.

LGDG: "Fats'ology", c'est un hommage à Hollywood Fats qui est un peu ton idole?

Nico: ce que j'aime sur l'album d'Hollywood Fats Band "rock this house", c'est justement le côté à la fois west coast et Chicago, il n'y a pas d'étiquette bien précise, c'est du blues et c'est foutrement bon !

LGDG: l'été dernier, vous avez participé aux festivals de Cahors et de Cognac (même si c'était hors programmation officielle) et ça a dû marquer un tournant pour le groupe qui a été vu par toute la presse spécialisée ? Ca vous a fait connaître?

Nico: ça a fait beaucoup de bien aux groupes qui jouaient au globe, il y avait aussi Mudzilla, un très très bon groupe de Bordeaux, ce sont des potes – on se connaît tous un peu – il y avait aussi Mr Tchang & easy money qui sont aussi des potes, il devait y avoir aussi Thomas Lacouture de Bordeaux. Il se trouve que d'après ce que j'ai entendu, la programmation officielle a dû un peu moins plaire à la presse et ils sont plus allé dans les bars et puis voilà: on a eu cette chance et c'est vrai que depuis ce concert, il y a plein de choses qui se sont enchaînées.

LGDG: Vous avez fait beaucoup de premières parties de vedettes américaines ?

Nico: beaucoup non ! on en a fait quelques unes: on a fait la première partie de Mighty Sam Mac Clain, récemment, on a fait la première partie de Phil Guy, on va bientôt faire la première partie de UP Wilson, Paul Orta et Shawn Pittman à Tournon d'agenais le 22 mars, au blues station.

LGDG: sinon, tu avais aussi partagé la scène avec Ana Popovic à Cahors ? (elle avait demandé s'il y avait dans le public un guitariste qui voudrait bien monter sur scène pour jouer sur sa guitare, ce qui fit Nico)

Nico: oui …

LGDG (JR insiste): hier, au New Morning, elle a refait le même numéro

Nico: le mec il avait un œuf sur la tête en sortant ou pas ?

LGDG: non, en plus, elle lui a fait la bise à la fin…

Nico: moi, elle m'a pas fait la bise, j'aurais bien aimé. Je me souviens du moment où j'ai joué, c'était bien, je me suis bien amusé. Ca n'a pas duré très longtemps, deux trois temps de chorus et elle m'a repris la guitare des mains et elle m'a foutu le corps de sa strato sur la tête.

LGDG: elle ne l'a pas fait exprès ?

Nico: je ne sais pas, j'en sais rien ! (rires)

c'est pas grave…

LGDG: avez vous joué beaucoup de concerts ?

Nico: oui, il y en a pas mal !

LGDG: qu'est ce qui est prévu pour la promo du cd ?

Nico: on continue à jouer partout, notamment dans les bars

On a quelques plans pour des festivals de blues cet été. Ca suit son cours normalement. On va être fier de pouvoir présenter cet album.

LGDG: il ne reste plus qu'à s'attaquer à une scène parisienne ?

Nico: ça va venir aussi, on nous a contacté.

Denis: il n'y a pas que les festivals, on va faire aussi les bars car le blues, c'est quand même une musique de bars.

LGDG: C'est l'un des problèmes actuellement à Paris, il y a de plus en plus de groupes de qualité et de moins en moins de bars où jouer !

Nico: il n'y a pas qu'à Paris, c'est vrai dans toutes les grandes villes, même sur Toulouse. C'est vrai que pour le blues, il n'y a plus grand chose.

Denis: même quand on va jouer dans un petit bar de campagne, et qu'il y a des gens qui viennent de toutes les campagnes environnantes, il se passe des super soirées !

Nico: bien sûr !

LGDG: Je parlais de Paris car la France est un pays très centralisé, notamment pour la presse, il y a forcément plus de retombées.

Denis: Mais c'est vrai qu'au niveau de la vie et du plaisir de jouer, c'est partout pareil !

Nico: comme dit Denis, on tourne beaucoup dans les bars et on adore ça !

A la base, cette musique, elle était jouée là. Tu as des bars dans les Charentes ou en Dordogne où il y a des gens qui font des centaines de km pour aller voir un concert dans un petit village, nous on aime ça.

Denis: et il y a un contact vraiment direct avec le public dans un bar. Quand il y a plein de monde et que c'est un peu petit, que ça bouge, c'est super !

Nico: on est très contents de jouer dans des festivals, de jouer sur des scènes plus grosses, plus conséquentes avec plein d'artistes de blues, partager ces scènes là mais c'est vrai que jouer dans les bars même à la campagne, c'est bien aussi. En fait, on adore jouer !

LGDG: Tu as boeuffé avec plein d'artistes américains ?

Nico: oui, il y a eu Long John Hunter dernièrement lors du Chicago Blues Festival, il y a eu aussi Kenny Neal, Phillip Walker, Billy Branch, …, quelques uns !

LGDG: Avez vous déjà joué aux Etats Unis ?

Fabrice: en fait, moi, je suis parti avec Rod & the shotgun blues en 1992, on est parti à San Francisco (déjà 10 ans !), on a rencontré un maximum de musiciens, on a découvert Tommy Castro, Johnny Nitro, des gens qui se produisent dans les clubs à San Francisco, qui jouent tous les jours, tous les jours: plein de rencontres !

LGDG: as tu participé à l'enregistrement de Rod avec Tommy Castro ?

Fabrice: non, avec Rod, j'ai juste enregistré la première cassette. Mais j'étais du voyage à Frisco avec la rencontre de John Lee Hooker. John Lee Hooker, j'y croyais pas, c'était incroyable ! une histoire de fous…

parce que justement, on avait cette cassette et on s'est pointé à une soirée où il y avait des producteurs, des managers, on nous avait dit de venir à cette soirée et on a rencontré la manageuse de John Lee Hooker, une jeune nana hyper sympa, on lui a filé notre cassette; on s'est dit de toute façon, on verra et puis 3 semaines après, coup de fil, c'était elle, et voilà !

LGDG: avez vous des projets de voyage là bas ?

Nico: ce serait le pied de partir tous les 4 ensemble et de s'amuser là bas – je parle pour ma part – ça fait très longtemps qu'on en parlait avec Abdell, partir un peu partout, à Chicago à Austin…

LGDG: et pas en Californie ? Tu n'aurais pas envie de rencontrer Rusty Zinn, Kid Ramos etc ?

Nico: si j'aimerais beaucoup rencontrer Rusty Zinn par exemple puisque c'est un de mes guitaristes contemporains favoris, même sans parler guitariste, c'est un des bluesmen contemporains le plus efficace, c'est un bon sideman, c'est un bon frontman, c'est un gars que j'aimerais bien rencontrer.

Denis: moi, j'aimerai bien rencontrer James Harman, alors s' il lit la gazette de Greenwood, qu'il essaye de me contacter !

Nico: moi aussi, j'aimerais beaucoup rencontrer James Harman !

LGDG: au niveau de la scène blues française, il y a actuellement de plus en plus de groupes qui jouent "west coast" comme les bluesin' Machine, les hoodoomen et d'autres, qu'en penses tu ?

Nico: moi, je suis content; mais je suis surtout très content de voir que les programmateurs s'intéressent de plus en plus aux groupes français en général. Il y a de la place pour tout le monde, il y a un tas de groupes différents qui ont chacun leur approche, et ça me fait vraiment plaisir qu'on dise: en France, il y a de bons groupes de blues. C'est la réalité et après, je ne sais pas ce qu'il en est du phénomène "west coast". C'est qu'il y a eu des trucs bien dans le west coast blues et que ça a influencé d'excellents groupes comme les hoodoomen, par exemple. Je ne les ai jamais vus mais j'ai entendu leur cd, il est vraiment génial. Les bloosers, pareil ! Les bluesin' Machine, c'est un excellent groupe !

LGDG: maintenant que vous allez avoir un cd, il faudrait penser à avoir un site web; vous êtes un des rares groupes à ne pas avoir de site officiel… C'est en préparation ?

Fabrice: on va y réfléchir. En fait, je m'étais penché sur la question, mais j'ai un peu laisser tomber.

On est en train d'en discuter avec le webmaster de Blues & Co

Denis: et puis on va avoir une page sur le site de outside records

Nico: ce sera une page press-book où on parle du groupe, c'est vrai que ce n'est pas un vrai site.

Denis: maintenant, il n'y a qu'un cd à notre actif, alors on ne va pas en faire des tonnes des non plus

LGDG: puisque l'on parle d'internet, Rosebud Blue Sauce a obtenu 3 nominations aux BottleNets 2001, mais n'en a gagné aucun. Qu'est ce que ça vous inspire ?

Nico: ça m'a fait plaisir et ça m'a fait bizarre en fait. Parce que nous, on débarquait. C'est par rapport à Cognac que tout s'est passé. Il y a des gens qui ont parlé de nous et qui ont fait que l'on a été nominés pour les BottleNets; moi, j'étais très content !

Je pense que ce genre de choses, il faut le voir avec un peu de recul, c'est vrai, ça flatte. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas gagné de trophée que ça va nous arrêter, ça fait surtout plaisir de voir qu'il y a des gens qui s'intéressent à ce qu'on fait.

 
 

Propos recueillis à Thouars par Jocelyn Richez le 02/02/2002

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Mo & The Reapers:
JAMMIN' THE BLUES

Jammin The Blues (Mo & The Reapers)

Ca y est ! Le voilà ! le disque qu'on attendait avec impatience est enfin disponible : Jammin' The Blues, enregistrement live de Mo & The Reapers à l'occasion d'un concert mémorable à Bourges où les Reapers avaient invité une floppée de musiciens (voir le récit de ce concert dans LGDG n°38).
On l'attendait pour de multiples raisons. D'abord parce que depuis le jour où j'ai mis Hot'n'Spicy dans ma platine (voir LGDG n°23) je suis un fan inconditionnel de Mo & the Reapers ! "On a ça en France??" s'est exclamé Xavier, l'animateur radio de Delta Blues! Eh oui, et ça s'appelle Mo & the Reapers :-)
Là, les Reapers ont choisi de montrer "l'énergie brute qui se dégage de leurs concerts" (dixit Blind Joe Castelbridge) et en effet, pour avoir été présent à Bourges ce fameux 10 novembre 2001, je peux vous garantir que l'esprit du concert est bien présent dans cet enregistrement réalisé de main de maître par Didier Magic Lamaze, celui-là même qui a enregistré en studio le chef d'œuvre Hot'n'Spicy.
Jean-Michel Borello sait donner le ton sur lequel ses acolytes et invités pourront s'exprimer. Dire qu'il a tout compris de la guitare et du chant blues est tellement évident… qu'il faut le dire ! Mo Al Jaz est certainement un des harmonicistes de la scène blues française qui a le mieux digéré l'esprit du blues… Je ne suis pas un spécialiste de l'harmonica, mais à l'écoute de Mo's Story, mon jugement est fait : au chant comme à l'harmonica, Mo est à classer aux côtés des plus grands !
Quant à au pianiste Michel Alzounies, aka Automatic Slim, il était au concert tout au service des autres musiciens (ces nombreux guitaristes qui ont le don de prendre le devant de la scène !) mais dans le disque on mesure pleinement l'importance de sa présence, en accompagnement comme en soli. C'est clair, sans son piano, les Reapers n'auraient pas la même saveur (épicée !).
Jeff Tronelle (qui rappelons-le, a réussi l'exploit de casser une corde de contrebasse lors du concert !) comme Steph Typhon Leblanc à la batterie sont irréprochables en donnant l'assise indispensable à un blues sans concessions.
Pour les " invités spéciaux ", je laisse nos chroniqueurs Pascal et René, qui n'ont pas assisté au concert, donner leur avis sur le disque Jammin' The Blues, sinon on va me traiter de vil flatteur ! " On a ça en France ? ", ben oui….! En plus des Reapers, on a Laetitia et Pascal " Pin 's " Pinède (Tia & the Patient Wolves), Sophie Malbec (Electric Lady Band), Julien Broissand (Scratch My Back), et même pour la première fois sur vos platines la participation du LGDG All Stars ;-)
Enfin, et là c'est une surprise qui fait plaisir, le CD est dédié à tous les membres de la Gazette de Greenwood. Un cadeau de Mo et Jean-Michel… ces " chers amis bluesophiles ", comme écrit Jean-Michel en introduction de chacun de ses mails adressés à la liste de diffusion LGDG!
Comme Hot'n'Spicy, ce CD est donc indispensable à tout ami bluesophile qui se respecte !
Stagg'O'Lee

date: 2 mars 2002
de: René Malines <renemalin@aol.com>

Ah, on peut dire qu'elle était attendue, cette galette ! Et peut-être plus particulièrement ici, à Greenwood.

Pensez! Un groupe qui a déjà fait ses preuves - c'est son 4ème album, et le précédent, Hot & Spicy [voir LGDG n°23], porte tellement bien son nom qu'il a foutu le feu à pratiquement tout le petit monde du blues hexagonal - et de surcroît avec 2 de nos concitoyens en front-line! Un peu qu'on l'attendait! De plus, Jean-Michel, guitariste de la formation, nous avait avertis du projet, invitant les musiciens de notre communauté à se joindre aux invités. Puis, l'événement à peine passé, nous avions les commentaires des Greenwoodiens présents au jour J, sur LGDG, la liste de diffusion associée à votre canard préféré.
Alors oui, nous étions tous impatients.
Et voilà, il est là, il est sorti, il est né le "divinenfant", ça y est.
Alors parlons-en.
Pascal, de l'Oreille Bleue, nous a pris de vitesse [NDLR: voir chronique ci-contre], mais comme on dit, 2 avis valent mieux qu'un.

Dès l'intro de I'm A Tough Guy, Jean-Michel mets les choses au clair : il aime les King, et son jeu le fait savoir. Il chante aussi, parfois comme si sa vie en dépendait. Tant mieux pour nous. Autant j'adore la délicatesse d'un Mississippi John Hurt, autant un bon vieux blues à l'arraché, ça te me vous décrasse les trompes d'Eustache bien comme il faut.

Laetitia Gouttebel, de Tia & The Patient Wolves, est venue faire un petit solo au style très particulier qui n'a pas l'air d'avoir convaincu l'ami Pascal. Permettez-moi un avis différent : son chorus est tout de force retenue, de passion bridée, comme un effort constant pour prévenir la déferlante. Ça donne un groove très spécial à son jeu, à la limite du malaise pour l'auditeur qui ne saurait s'y abandonner. C'est encore plus évident sur Stomach Ache, titre que peu ont osé reprendre au grand Junior Wells. Le chant tout en rythme rend la chose plutôt ardue, mais Laetitia s'en tire avec une aisance déconcertante. Attention les mecs, ce pays commence à voir de talentueuses blues girls bien armées pour défendre le blues aux côtés des garçons.

Et voilà, à peine le temps de survoler 2 titres, et j'ai pratiquement déjà utilisé tout l'espace normalement réservé à une chronique de disque! C'est qu'il y en a des choses à dire sur cet album! [NDLR: à greenwood, quand on aime on ne compte pas :-) ]

Ne nous attardons pas sur Pascal "Pins" Pinède, non qu'il ne le mérite, mais l'autre Pascal, toujours de l'Oreille Bleue, a déjà dit tout le bien qu'on peut en penser. Si, une chose quand même: j'ai beau écouter le disque encore et encore, je ne trouve pas ces fameux "turn around qui s'emmêlent". Mais bon, je ne suis pas guitariste, peut-être n'ai-je pas l'oreille aussi experte? En tous cas, ça ne m'a pas choqué.

Pour en revenir aux Reapers proprement dit, parlons un peu de Mo Al Jaz. Comme Jean-Michel, il chante avec une belle conviction, et comme lui -est-ce l'influence de ses harmonicas ? - avec diverses nuances selon les titres, pour notre plus grand plaisir. On dit souvent qu'il y a de bons musiciens de blues en France, mais que les chanteurs dignes de ce nom ne sont pas légions. Ecoutez Mo, Jean-Michel, et on en recause, d'accord?

Et puisqu'il est question de chant, il faut parler de Sophie Malbec, de l'Electric Lady Band. Encore une fois, les blues girls font preuve de courage: déjà, s'attaquer au Hound Dog de Big Mama Thornton, il faut avoir les c… qualités. Mais alors, la puissance vocale parfaitement maîtrisée de ce petit bout de bonne femme, pardon!
Moi, c'est simple, c'est LE titre qui me colle le frisson. A chaque fois.

Impossible aussi de ne pas évoquer ce grand moment de fraîcheur qu'est I Can't Send You No Mo' e-Mails, où not' maire Oli s'en sort avec les honneurs, et son compère Patrice Champarou prouve, lui, qu'il n'est pas nécessaire d'être très connu pour être un guitariste acoustique tout ce qu'il y a de plus accompli. Bravo à nos deux défenseurs du country-blues, bien entourés par Mo et Jean-Michel.

Roll'Em Slim, le dernier titre, laisse l'occasion à Michel Azounies au piano et Jeff Tronelle à la contrebasse de s'exprimer pleinement en de beaux solos bien savoureux.

Au fait, dernier titre, vraiment ? Non, car après un court silence, la plage se poursuit pour terminer sur une mini-jam tout ce qu'il y a de réjouissant, bien dans l'esprit de l'ensemble de cet album très convaincant au son superbe.

Bref, contrairement à Pascal - il va croire que je lui en veux! Mais non, Pascal, pas du tout! - je trouve que l'on retrouve ici tout l'esprit, la fraîcheur et le dynamisme de Mo & The Reapers, avec le plus qu'apportent quelques invités bien choisis. C'est, en quelque sorte, autant de bonus.

Ah oui, une dernière chose : avant la parution du disque, Jean-Michel nous a fait des tas de mystères à propos de la couverture, en proie aux affres du doute, se demandant si c'était de bon goût…. Franchement, si la question peut se poser pour lui, qui vécu à New York, pour nous autres, petits Français, il y a peu de chances pour que se rouvrent de récentes blessures mal cicatrisées. Et puis, c'est le thème de l'une de ses nouvelles compos, alors…

Enfin, vous savez ce qu'il vous reste à faire ? Ça se passe sur www.moandthereapers.fr.fm, à la page contacts.

date: 28 février 2002
de: Pascal <loreillebleue@free.fr>

Enregistré live au Club des Jacobins à Bourges, cette galette ne regroupe pas moins de six invités venus prêter leurs six cordes et leur voix à l'équipe. Pour la section rythmique des Reapers, (Jean Michel Borello à la guitare, Michel Alzounies aux claviers, Jeff Tromelle à la contrebasse et Steph "Typhon" Leblanc à la batterie) rien à dire, ils tiennent l'ensemble afin de permettre au chant et aux solos de se placer tranquillement et ça marche plutôt bien. Une mention spéciale pour Michel aux claviers qui bien que discret dans l'ensemble, n'en est pas moins efficace lors de solos très inspirés. Au chant comme à l'harmo Mo Al Jaz est vraiment convaincant et dégage un bon feeling .

Ce qui ressort de cet album, c'est avant tout une sensation de convivialité, de bonne humeur et de plaisir qu'ils ont partagé avec leurs invités. Il faut surveiller Pascal "Pins" Pinède qui malgré quelques Turn Around qui s'emmêlent avec la seconde guitare nous présente quelques solos qui touchent au but.

Sophie Malbec tient parfaitement sa place à la guitare mais c'est à la voix que sa prestation prend une autre dimension.

Bien qu'un peu décalé dans l'ambiance générale de l'album, le titre acoustique avec Patrice Champarou et Olivier de Lataillade est superbe. Même les quelques imprécisions semblent être là juste pour nous rappeler que c'est un live. Je ne sais pas s'ils ont l'habitude de jouer ensembles mais on pourrait le croire.

Julien Broissant s'intègre parfaitement à la qualité de l'ensemble. avec des interventions très bien senties.

J'ai été moins convaincu par la prestation de Laetitia Gouttebel comme si elle était très tendue, sur le fil. Ce n'est cependant pas suffisant pour altérer la qualité générale de cette galette qu'il faut vous procurer au plus vite.

Je passe sous silence les petits défauts de son (vraiment minimes), on est en live!! Mon seul regret, c'est d'avoir écouté un album d'invités accompagnés par Mo & the Reapers et pas l'inverse.

ref CD: Jammin' The Blues, Mo & the Reapers, autoproduction, 2001

le site officiel de Mo & The Reapers: www.moandthereapers.fr.fm

Mo & The Reapers dans la Gazette:

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Slawek
en Afrique(janvier 2002, Ndjamena)

date: 14 février 2002
de: Jef

Après 5 heures de vol, enfin : NDJAMENA, capitale du TCHAD.
Petit aéroport paisible (2 vols internationaux par semaine) et tout de suite, l'Afrique, avec la douane, un foutu bordel, paisible mais avec ses règles propres, inaccessibles à l'européen standard. Et puis aussi, cette odeur acre qui te prend les narines sitôt sorti de l'avion. La poussière omniprésente en cette saison sèche, soulevée par le vent et qui ne nous lâchera pas du séjour. Après un très chaleureux accueil de Slawek et son équipe par Didier Moniotte, directeur du Centre Culturel Français, premières piqûres de moustiques : eux non plus ne nous lâcheront pas du séjour. Slawek Et puis, au matin, premières impressions du Tchad en se rendant à la salle de spectacle pour la balance : les rues de NDJAMENA, toutes perpendiculaires les unes aux autres sont pour une bonne part en terre et toutes percées comme de vieilles chaussettes usagées . Les premières que nous prenons sont bordées de murs derrières lesquels on devine des maisons . Enfin la salle de spectacle : super accueil d'Ali, le tchadien qui avait rencontré Slawek sur un festival de blues en France et qui voulait absolument le faire jouer chez lui. Il réalisera un super son malgré le peu de matériel dont il dispose et la poussière qui lui en abîme beaucoup. La balance sera donc relativement longue, mais permettra à tous de se familiariser au son et au lieu.

Le soir, Slawek va entraîner tout le public sur ses blues et chansons, dont certaines paroles resteront dans la mémoire des personnes présentes (et notamment cette satanée Baignoire pleine d'histoires) et les applaudissements fuseront après chaque morceau, une grande partie du public venant saluer les artistes à la fin du show. Très applaudi, Stan, à la basse 5 cordes sur laquelle Aymé, bassiste du groupe Tibesti (le groupe phare ici), fera les yeux doux (pas de matos ici) ; Christian, notamment à l'harmonica (il joue aussi des percussions), fera des adeptes, surtout lors d'un bœuf organisé dans le plus grand pub restaurant de la ville avec des musiciens de Tibesti et de Slawek, quand il improvisera sur la musique africaine, les sons se marient si bien; Gilles, à la batterie, et sa super oreille musicale qui, en assurant shuffles et binaires costauds, sera apprécié de tous; et bien sûr, Slawek, pour son jeu de guitare plein de feeling et la justesse de sa voix. Il organisera la 2ème soirée à laquelle participera un certain nombre des musiciens tchadiens (percus, batterie, guitare et basse) en vogue actuellement à Ndjamena. On y verra notamment Slawek, un moment, seul blanc sur scène, pour un shuffle d'acier, avec une rythmique black, échanger chorus sur chorus avec Joe, guitariste tchadien immense en taille(2 mètres au moins) et en talent.

Comme tout a une fin, après divers échanges avec les musiciens locaux, après un bon nombre de bières et de pastagas éclusés au coin des bars ou chez eux et après un somptueux repas chez l'ambassadeur en l'honneur du concert de Slawek, il faudra échanger adresses et e-mails avant de reprendre l'avion.

Mais heureusement, un projet pour une nouvelle tournée a germé pendant le séjour dans toutes les têtes, notamment dans celle de Slawek qui veut développer son concept de World Blues .

Votre correspondant, JEF.

le site officiel de Slawek: slawek.blue-west.com

Slawek dans la Gazette de Greenwood:
Souvenirs de vacances: Slawek à Quiberon (LGDG n°24)
Interview Exclusive de Slawek: le polonais du blues français et le World Blues (LGDG n°15 )
Slawek au Pôle Sud! (LGDG n°16)

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Nuit du Blues
organisée par Blues & Co (Thouars)

date: 3 février 2002
de: Jocelyn Richez <jrichez@noos.fr> (photos de l'auteur)

Steve Verbecke et Peter Nathanson
Steve Verbecke et Peter Nathanson

Philippe Grancher
Philippe Grancher

Cadi Jo
Cadi Jo

Miguel M
Miguel M
Je reviens tout juste de Thouars où j'ai assisté à la nuit du blues organisé par Blues & Co.
Je dois dire que c'était une parfaite réussite avec une ambiance vraiment très sympa, de très bons concerts, et un public présent au rendez vous, le théatre de Thouars étant archi comble pour l'occasion -ça fait plaisir!!

L'affiche était de qualité avec 5 groupes Français (ou assimilés), dans l'ordre de passage, Philippe Grancher, Rosebud Blue'Sauce, Miguel M, Cadi Jo et Peter Nathanson & le Steve Verbeke Blues Band et une présentation du fameux tonton Erick de Blues & Co.

Pour moi, le clou du festival fut la prestation de Rosebud Blue' Sauce avec un Nicolas Duportal de plus en plus impressionnant non seulement à la guitare mais aussi au chant. Le concert basé en grande partie sur les morceaux du cd qui doit sortir d'ici quelques jours fut d'une qualité exceptionnelle avec une orientation moins jump qu'à Cognac, plus Chicago compte tenu de l'arrivée dans le groupe d'un harmoniciste.
Le plus beau morceau du concert fut pour moi une longue version de Louise joué à la T Bone Walker: un petit bijou. Comme disait le tonton Erick au micro à la fin du concert: "Vous comprenez maintenant pourquoi on les aime!!!"
J'ai juste regretté que le concert était trop cours à mon goût; une heure, ça passe parfois très vite!

L'autre musicien qui m'a beaucoup impressionné durant cette soirée fut Steve Verbeke (que pourtant je connais bien pour l'avoir vu souvent) et qui a, à mon sens "volé la vedette" à Peter Nathanson, bon guitariste (quoi que parfois, il se perd dans des démonstrations un peu trop techniques) mais limité au chant. Les solos d'harmonica de Steve Verbeke ont vraiment donné du relief et de l'éclat à ce concert qui était programmé (trop) tard à partir de 2h du matin, à un moment où les musiciens comme le public commençaient à piquer du nez. A revoir à une heure moins tardive, car le groupe dans son ensemble est d'un excellent niveau à l'image du cd très réussi de Peter Nathanson.

Les deux autres bonnes surprises ont été pour moi Philippe Grancher et Cadi Jo. Je n'avais pas été convaincu par le dernier CD de Philippe Grancher, trop funky à mon goût et sans ligne directrice au contraire du concert d'hier avec un bon groupe pour jouer du blues, notamment Guillaume Petite impéccable au piano. Le répertoire fut très classique avec notamment un très beau stormy monday. Si sa voix manque de puissance, il a un très beau touché de guitare notamment dans les blues lents.

Cadi Jo a fait un set varié essentiellement du Chicago blues, avec de nombreuses compos en Français (assez réussies racontant les galères de la vie quotidienne) et en testant des formules différentes: un morceau seul à l'harmo et un avec juste le bassiste.

Enfin, Miguel M est venu sans les cuivres (c'est pas plus mal, ça évite un répertoire plus rhythm & blues qui me plait moins). Il a joué un blues rock assez musclé et certains qui le découvraient l'ont comparé à Popa Chubby (pas pour le physique, heureusement pour lui). Il fut plus grimaçant que jamais, mais c'est plutôt bon signe, car généralement, quand il grimace, il sort en même temps un bon solo; Il a fait une descente dans le public à la Lucky Peterson pretexte à de long solos. Et puis, je signale qu'il a fait monter sur scène le gamin de Lorenzo Sanchez qui a une dizaine d'années et qui a tenu la batterie le temps d'un morceau. C'était sympa et bien dans l'esprit du blues. Ils ont obtenu un gros succès.

Malheureusement, le boeuf final fut annulé car il était déjà plus de 3 heures du mat. C'est bien dommage car il aurait sans doute était sympa, avec notamment Mathias Dalle (des Bluesin' Machine) qui était venu avec sa guitare pour le boeuf: dommage mais la nuit fut déjà bien remplie.

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Festival Blues
de Gaillac

(Tarn)

date: 3 mars 2002
de: Xavier Delta Blues <deltablues@wanadoo.fr>

Les 1° et 2 Mars 2002 avait lieu à Gaillac, cité viticole du Tarn la 4° édition du Festival Blues. Cette année, l’association TOHU-BOHU ( 05.63.56.49.40) avait souhaité faire évoluer la programmation vers d’autres cultures. D’ou le nom rebaptisé : Gaillac In Blue. Effectivement, quelques groupes tels que Dr ZOLIVIER, BEGUIN I DO et LES MADELEINES n’avaient pas grand chose à voir avec le Blues, si ce n’est leur nom côte à côte de grands noms du Blues sur les affiches du Festival. Je profite de cet espace pour adresser une mention spéciale aux Madeleines, limite Négresses Vertes et World Music Tziguane qui assurait les changements de plateaux avec beaucoup de talent, d ’énergie et d’humour.

Mais là n’est pas le débat !!

Vendredi soir, il fallait avoir de bonnes jambes pour « surfer » de bar en bar afin de pouvoir se délecter de quelques noms bien alléchants sur la programmation : Jeff Zyma, Mathis’s Mathematical Blues Band, New Chump Change et Mammouth King Blues Band.

Le gros avantage d’avoir une programmation étalée au 4 coins de Gaillac, c’est qu’on a au moins un bon alibi pour se désaltérer avec la bière de Mars. ( Pour un pays qui fait du vin ….. C’est un comble ). J’en profitais donc pour rejoindre des amis « blueseux » au Bar Chantilly ou se produisaient les « Mammouth King Blues Band » , groupe venu de Fronton ( décidément, on se demande si c’était un Festival de Blues ou la Fête du Vin ?? ). Je n’aurais certainement pas suffisamment de place à l’intérieur de la Gazette pour vous raconter le bonheur que m’ont procuré ces gens là. Pas de batterie, seulement une rythmique assurée par un Washboard, tenu avec beaucoup de charme et d’efficacité par Kristelle, des Cuillères et une Contre Basse enlevés par le Géant Olivier, un Piano très «  Boogie Woogie  » envolé par Filou Pinetop Perkins ( ça c’est moi qui le rajoute ) et deux Guitares. La première assurée au Dobro par Mammouth, Chanteur Guitariste de ce groupe pas comme les autres, et la deuxième par Luc, Petit Homme empreint de Grand Talent et de Passion. Je crois pouvoir vous assurer sans me mouiller beaucoup (tiens de la flotte!!) qu’ils furent la Révélation de ce Festival. Et puis ensuite il y avait les plus connus. Tout d’abord, Jeff Zyma, américain exilé chez nous depuis 1987, qui avait appris à jouer le Blues à la Nouvelle Orléans, et qui en profitait ce soir là pour promouvoir son 3° album, Short Fat and Ugly.

Parlons maintenant des Mathis’s Matematical Blues Band, venus tout droit de Nîmes, ( encore un pays ou on fait du vin ), et qui continuent à se perfectionner en vue de la sortie de leur album. J'avais entendu beaucoup de bien des Mathis's Mathematical. Jocelyn Richez m'ayant même envoyé par mail dernièrement une remarque à leur sujet, liée à leur absence dans la CD Théque de mon site web. J'attendais donc leur prestation avec grande impatience. Bien malgré moi, je fut surpris ce soir là par leur absence de communication scénique et je l’ai surtout regretté. Je n'ai ressenti que bien peu de chaleur lors de leur prestation sauf sur 1 morceau, la reprise de "Catfish".

Saluons tout de même le jeu bien efficace de Delphine à la batterie, et le jeu de guitare et la voix toutes aussi efficaces de Mathis. J’espère que cette impression perçue à Gaillac n’était qu’un passage à vide pour ce groupe dont on ne peut que louer les louanges musicales. De ce fait, je souhaite les revoir plus longuement sur une scène adaptée au talent que me procure le plaisir de leur CD de démo. Affaire à suivre ....

Et le 4° groupe de cette soirée, que je n’ai malheureusement pas vu, les New Chump Change. J’en ai entendu également beaucoup parler, et il aurait été bon que je puisse me rendre compte de leur réputation. Mais, les hasards de nos pèlerinages à travers les bars de la cité du vin Tarnaise, en ont voulu autrement. Ce n’est que partie remise. En résumé, une soirée remplie de Blues et arrosée par la bière sous un climat doux comme le vin blanc de Gaillac, qui m’aura quand même mis au lit à 5.00 heures du matin. Pas simple de couvrir ce genre d’exhibitions !!! L’an prochain, c'est juré, je me paye la mobylette à Gérard Lambert ;-))

Après avoir passé l’après-midi de Samedi à me reposer de ma soirée ( nuit ) précédente, je retourne donc à Gaillac pour voir la clôture du Tremplin Jeunes, une scène ouverte sous chapiteau, entièrement dédiée aux nouveaux talents Tarnais. Les Be Yell Blues , groupe d’ados seringués au Rythm & Blues, finissaient leur prestation qui comme d’habitude était de grande qualité. Je pénétrais ensuite dans la Salle des Spectacles, qui s’était considérablement remplie, pour assister au concert du Trio Philippe Nicolas. Un trio de Jazz, emmené par Philippe Nicolas au Piano à Queue. Quelle CLASSE mes amis !!! Moi qui ne suis pas spécialement amateur de Jazz, je suis tombé à la renverse sous le Boogie de ce groupe venu de Poitiers. A voir absolument si ils s’arrêtent près de chez vous. Tout y passe : Blues, Jazz, Country et même Classique sous la forme d’un Jean Sébastien Bach revisité façon Boogie. Je vous l’avait dit LA CLASSE !!

Après eux, arrivait sur Scène, celui que j’attendais depuis que j’avais pris connaissance de la Prog : Greg Szlapczynski. Tout le public, je dis bien « TOUT le PUBLIC », est tombé sous le charme et le talent de ce prodige de l’Harmonica. J’ai regretté, (mais l’ai je vraiment regretté au vu de son talent ??) que son concert ne fut pas entièrement Blues, comme sur son CD Live « GregTime ». Le moment fort de son passage fût sans nul doute la réunion du public devant la scène. Greg délaissant micros, amplis, harmonicas pour être rejoint par son Guitariste (dont j’ai oublié de noter le nom L - il demanda au public de claquer des doigts pour assurer la rythmique, et il leur (nous) chanta une ballade Blues, on se serait cru au coin du feu !! Une émotion à couper au couteau et un dressage de poils sur les bras en bonne et due forme !! Un tonnerre d’applaudissements venant saluer ce grand moment d’intensité de la soirée. Je passerai volontiers sur les titres interprétés ce soir là par Greg, dont un Blues Polonais, chanté en …. Polonais, puis une valse rythmée au Piano par la très séduisante Marine Bercot .

Mis à part ces petites incartades musicales, je placerai volontiers Greg Szlapczynski sur la plus haute marche du Podium de ce 4° festival  Gaillac In Blue.

Je n’ai juste eu le temps de lui poser quelques questions et de nous échanger nos coordonnées après son concert, avant qu’il ne soit « kidnappé » par une nuée de nanas qui voulaient repartir avec sa signature sur son CD. Y en a comme ça, ils ont tout !! Le charme, le talent et la gentillesse. A noter la bonne prestation à la Batterie du fiston Milteau, fils de Jean Jacques Himself, que je découvrais également ce soir là. Je n’oublierais pas non plus d’adresser la mention qui se doit aux autres membres de la troupe à Greg, qui forment l’unité autour de leur Leader. Petit scoop, le 29 Mars prochain devrait voir la sortie de son nouvel album !!! A bon entendeur ……

Pour reprendre les métaphores vinicoles de ce début d’article, le 4° Festival de Blues de Gaillac fût un bien bon Millésime.

J’ai noté dans mon agenda d’aller voir ou revoir deux intervenants de ce festival : New Chump Change et Mathis’s Mathematical. Pour les autres, je les reverrai également, mais pour ré-éprouver le même frisson que ce week-end.

Le 19 Mars prochain, Jeff Zyma sera invité dans Delta Blues (perso.wanadoo.fr/deltablues/)pour un Concert Privé, et le 9 Avril, ce sera au tour des Mammouth King Blues Band d’investir nos studios pour nous assurer de leur Concert Privé.

On a pas fini d’en entendre parler dans la Gazette !!!!

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les Bluesin'Machine
à Bruxelles

date: 14 mars 2002
de: Didier "Don't Forget To Boogie" <dvandenbranden@swing.be>

Hier soir, le Music Village programmait les Bluesin'Machine. Il faisait un temps épouvantable à ne pas mettre un amateur de blues dehors: pluie serrée, froide et mouillée(!). Vent fort et toujours de face (dingue!). Chaussures en mauvais état et pieds humides...

Arrivés à l'entrée, la (charmante) dame à l'accueil nous annonce à mon pote et moi, dégoulinant sur la moquette, que le Music Village est un club privé et qu'une carte de membre est nécessaire pour y pénétrer... 9 € la carte et 10 € l'entrée. On a payé sans oser penser au prix des boissons...

Salle cosy, petites tables basses (trop pour mes lombaires fatiguées), décoration soignée, miroirs brillant et lumière tamisées, une salle habituée au jazz. Bon, ça nous change de Nekkersdal ou du Grain d'Orge (j'en passe et des meilleures...).

On remarque le groupe à une table, finissant leur souper. On s'installe devant la petite scène où piano, batterie, contrebasse et guitare attendent les musicos.

Le concert à commencé à l'heure et sur les chapeaux de roue: "Bonsoir, nous sommes les Bluesin' Machine, nous jouons du jump et venons de Lille. C'est notre première visite à Bruxelles et nous sommes très contents d'être avec vous ce soir", c'est parti pour deux sets de reprises principalement de T-bone Walker (6 certainement, et peut être encore 1 ou 2 que je n'ai pas reconnues), BB King, Muddy Waters, et de quelques compositions originales.

Une première partie qui n'a pas vraiment décollée, une deuxième beaucoup plus intéressante pour les ceusses qui écoutaient comme pour le groupe. Les reprises de T-bone étaient particulièrement inspirées et respectueuses, flirtant du côté du jazz, également une très belle version de Kansas City et le plaisir évident qu'ils avaient à jouer ont rattraper un manque total (au début du moins) de participation du public (le jump, c'est fait pour bouger, pas pour rester le cul dans un petit fauteuil prétentieux!). La prochaine fois, je reste debout pour pouvoir bouger comme je le veux.

Après le concert, j'ai été les saluer et les remercier pour le bon moment passé ensemble. Quand Stéphane, le pianiste, m'a demandé comment je les connaissais, j'ai parlé des commentaires élogieux d'un Jocelyn Richez et Stéphane d'opiner "Ah oui. La Gazette de Greenwood..."
Sont bien ces gars là!! [NDLR: :-))]

Les Bluesin' Machine dans la Gazette:
les Bluesin' Machine au Biplan LGDG n°40
Bluesin' Machine: T Bone blues LGDG n°39

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Ike Turner
au Jazz Club Lionel Hampton
Le retour du papy prodigue !

date: 20 février 2002
de: René Malines <renemalin@aol.com>

Papy, papy, faut le dire vite !
Malgré ses 70 ans avoués, l'ex-talent scout des studios Sun de Memphis - on lui doit d'avoir fait enregistrer chez Sam Phillips des bluesmen qui allaient devenir de véritables légendes, Buddy Guy , Otis Rush et Chester "Howlin' Wolf" Burnett n'en étant pas les moindres - à la tête de ses nouveaux Kings Of Rhythm, tenait la grande forme en ce soir de février 2002.

Accompagné de 8 musiciens et une chanteuse, lui-même au chant, à la guitare et aux claviers, 10 personnes en tout sur la petite scène, le méchant garçon du blues et du rhythm & blues a bien failli faire trembler les murs de l'honorable Jazz Club!

Il faut dire que l'homme a semble-t-il fait le bon choix en préférant offrir au public un florilège de vieux succès plutôt que de le faire profiter des titres de son nouvel album "Here And Now", pourtant excellent.

Mais il paraît que c'est dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe. C'est en tous cas la recette qui a conquis l'audience, qui en redemandait, alors comment en vouloir à Mr Turner?
Il faut bien avouer que tout çà fonctionnait à merveille, même si on se serait cru au Quai du Blues ou autre lieu "exotique" pour cadre supérieur en goguette - il fallait voir les bouteilles de champagne à 400 €uros l'unité défiler à certaines tables - que dans un véritable Blues Club. Et la présence majoritaire de ce type de public, dont les plus jeunes affichaient une cinquantaine bien tassée, justifiait pleinement le choix de ce répertoire pour le moins nostalgique. Mais Ike Turner s'en est tiré avec les honneurs, insufflant aux pires rengaines comme aux meilleurs titres une énergie et une maîtrise qui n'avaient d'égal que son évident plaisir d'être là, à partager pour un soir un peu de cette gloire retrouvée. La gueuse lui était restée infidèle depuis sa séparation avec la grande Tina il y a plus de 20 ans, il a purgé sa peine - à tous les sens du terme, puisqu'il a fait 17 mois pour possession de cocaïne - il est plus que temps de faire table rase du passé pour s'intéresser à cet excellent artiste.

L'homme s'est d'ailleurs refait une santé, il ne fume plus - il était même interdit de fumer dans la salle pendant le concert! Les Greenwoodiens présents n'ont pu s'empêcher d'avoir une pensée émue pour leur concitoyen Eddie - il ne prend plus de drogue, il est sobre et bien portant, et il s'est même trouvé, après un 13ème divorse, une nouvelle compagne en la -jeune - personne d' Audrey Madison, également chanteuse du groupe. Et là, on a pu constater que Ike Turner ne s'est jamais vraiment remis de ses 18 ans de vie commune avec Tina : même sensualité sauvage, même aimant pour les regards masculins, même répertoire, y compris Nutbush City Limits, un titre entièrement écrit par Tina, et même façon de chanter, sauvage, puissante et passionnée. Le couple est allé jusqu'à nous refaire le coup de la version éminemment érotique de I've Been Loving You Too Long comme sur le disque enregistré à l'Olympia il y a quoi, 30 ans?

L'amateur de bonne musique retiendra les excellentes interprétations de 5 Long Years - devenu pour l'occasion 18 Long Years "Even made a movie !" - Rocket 88, son succès de … 1951 ! et quelques blues superbes au milieu de versions certes sympathiques de Johnny B.Goode et autres Tequila.

Jean-Michel Borello, co-leader de l'excellent groupe Mo' & The Reapers, demandait si le père Turner avait toujours ce même jeu de guitare cinglant :
Et bien oui, 100 fois oui, absolument!
Autant on a pu le trouver mal assuré à la guitare - et bien meilleur au piano - lorsqu'il s'était produit sur la scène de la Cigale il y a quelques années, en invité sur la tournée de Joe Louis Walker, autant au Méridien, il semble qu'il ait retrouvé le jeu et le son qui ont fait les belles années de ses mythiques Kings Of Rhythm, première mouture.
Cinglant, oui, c'est le mot.

Le bonhomme nous a même très agréablement surpris en démontrant qu'il était tout à fait capable de jouer dans des styles très différents, par exemple cette belle démonstration de flat-picking sur-vitaminé sur Mama Don't Like.

Précisons enfin que ses musiciens - dont nous n'avons malheureusement pas retenu les noms - sont tous d'un excellent niveau, avec mention particulière pour son trompettiste, qui jouait vraiment blues, fait assez rare sur cet instrument particulier, et ses 2 claviers, l'un au piano uniquement et l'autre imitant toutes sortes de sons, particulièrement l'orgue, et un assez bon rendu de la pedal steel guitar sur les titres plus country.
Quant à son bassiste, non seulement il assure en soutien, mais ses solos étaient vraiment bien aussi, construits, intelligents, loin des slapping désordonnés et tape-à-l'œil qu'aiment nous infliger certains de ses collègues à 4, 5 ou 6 cordes.

Bref, un bon concert, plus showbiz que juke-joint, mais une telle légende accompagnée de musiciens aussi talentueux, on aurait tort de bouder son plaisir.

Espérons malgré tout qu'une prochaine fois, plus confiant dans son succès, Ike Turner et ses Kings Of Rhythm nous reviennent avec un répertoire plus personnel, et surtout plus actuel. Parce qu'à l'écoute de son dernier album, il est certain qu'Ike Turner a encore des choses à dire. On peut aussi recommander -vivement ! - la dernière réédition de ses faces avec les 1ers Kings Of Rhythm.

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Duke Robillard
au New Morning

date: 13 février 2002
de: Benoît "Planet Harmonica" Felten <ben@planetharmonica.com>
(photos Jocelyn Richez)

Contexte plutôt sympa : beaucoup de monde, beaucoup de greenwoodiens (parmi ceux que j'ai reconnus ou identifiés : Jocelyn, Tof, Xavier, Pascal (l'Oreille Bleue) et bien sûr, René (la Chemise Orange.) Il y en avait peut être d'autres...

Duke Robillard Premier set : le concert commence sur un instrumental jazzy sympa qui nous permet de découvrir le line-up : Duke Robillard à la guitare, plus vieux et plus enrobé que je ne l'imaginais, avec des lunettes fumées qui n'ont pas l'air d'être pour la frime (quand il les enlève, il ferme les yeux), Mike Teixeira à la batterie, un peu trop bûcheron à mon goût (mais j'aime trop les batteurs fins, ne m'en voulez pas), Doug James au sax Tenor et Baryton (surtout Baryton : Miam!) et un contrebassiste électrique dont je n'ai pas retenu le nom. Le premier morceau est vraiment très sympa même si le contrebassiste n'a pas l'air très "chaud" sur son solo (normal, c'est le premier morceau).
Les accompagnements de Duke pendant les soli de ses acolytes sont tout en finesse, vraiment supers! Suivent quelques morceaux assez quelconques, un peu rockabilly, un peu classic blues, où Duke joue un peu comme tout le monde. Décevant après ce qu'on avait vu dès le début. A la fin du set, un long slow blues joué sur la strato au lieu de la Gibson réveille un peu le public, un style assez mordant à la Albert Collins. Impression globale : c'est sympa, mais pas exceptionnel...

Duke Robillard Le deuxième set commence sur les chapeaux de roues, avec un autre instrumental jazzy, qui va lui donner le ton de l'ensemble du set : le blues qui tend vers le jazz : c'est clairement là que Duke est excellent, ses accompagnements tout en finesse, ses chorus atypiques (pour un guitariste de blues) mais subtils et toujours lisibles, accessibles (je soupçonne que des mordus de guitare jazz eussent trouvé ça "vulgaire" mais moi qui ne suis pas un grand fan de guitare jazz, j'ai adoré !) En fait, à l'exception des deux morceaux du rappel, le registre a été dans le jazzy tout le long du set, avec des longs solis de guitare, bien sûr, mais aussi de baryton, avec ce son rauque et pêchu dans le registre grave de l'instrument, et de contrebasse, avec pour le coup un contrebassiste qui, une fois chauffé, savait faire sa tambouille. Bref, malgré l'impression mitigée du premier set, il fallait rester : une fois chauffés et ayant senti le vent, le Duke Robillard Band a su faire monter la sauce de manière excellente!

J'ai hésité à acheter un album de Duke, me disant que si le répertoire se partageait entre swing blues et blues texan, la moitié allait me gonfler... Du coup, je me suis rabattu sur l'album de Doug James, le sax, et je vous donnerais mes impressions sous peu! [les impressions de Ben furent bonnes: voir article ci-dessous!]



Duke Robillard
à Besançon

date: 6 mars 2002
de: Didier Taberlet <didtab@didtab.org>

Vendredi 1er Mars, Eric Gueneau et moi avons organisé un convoi automobile pour nous rendre à Besançon, distant d'une centaine de kms de Dijon, dans le but d'y applaudir Duke Robillard.

je dois dire que j'attendais beaucoup de ce concert, du fait d'une petite déception relative à la première fois où je l'avais vu sur scène, il y a 2 ans de cela au festival de Salaise sur Sanne. Duke vendredi était en grande forme, mes attentes ont été vite comblées, et même plus que ça!

Je n'ai pas souvenir de m'être pris une aussi grande claque lors d'un concert blues. Possédant à la fois une grande technique tres personnelle, et aussi un feeling hors du commun, Duke a conquis la salle (honorablement remplie) en quelques mesures.

Mais ce qui a surtout marqué le concert, c'est l'assise remarquable de la section rythmique, composée pourtant de musiciens *relativement* jeunes. Une osmose parfaite entre batterie et (contre)basse (Mark Teixeira à la première et Jesse Williams à la seconde), et des musiciens époustouflants d'efficacité. Aucune démonstration technique, pas même un morceau de slap de la part du bassiste (c'est vous dire !), un batteur jouant sur un instrument hérité du jazz (3 fûts + caisse claire), mais une mise en place et une cohésion à tomber. le saxophone (Doug James), comme il fallait s'y attendre, n'était pas en reste non plus.

Le groupe m'a fait penser à ce niveau, même si le répertoire n'est pas du tout le même, au Tommy Castro Band, qui possède la même unité musicale et la même "soudure" entre membres. Beaucoup de compositions de la part de l'ex-guitariste des Roomfull of Blues, quelques reprises de T-Bone bien sûr, et pour terminer un Glamour Girl lancinant qui restera dans les annales.

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Bo Weavil
à La maison de L'étudiant, Caen

date: 7 mars 2002
de: Pascal L'Oreille Bleue <loreillebleue@free.fr>

J'avais entendu parler des Bo Weavil plutôt en bien, j'avais donc prévu d'aller les voir à Caen (le 6 mars 2002). Ca fait un peu de route mais malgré (ou parce que) qu'il les ai déjà vus 3 fois, Jean Luc accepte de m'accompagner. En sortant du bureau, le temps de le ramasser en ville de passer me changer et en route vers une soirée Blues. Je vous passe les difficultés à trouver La maison de l'étudiant qui nous a fait arriver en retard.

La scène est déjà occupée par Midwest. Il fait noir mais Francis Marie nous a vu arriver, il est assis à coté de Bernard Marie et de Philippe Brière (3 Hoodoomen). J'aperçois Thierry Anquetil non loin. Normal, on est sur leurs terres. Il m'a fallu un peu plus de temps pour reconnaître Marc Loison (le Greenwoodien) à la guitare sur scène. Je suis arrivé bien trop tard, le peu que j'ai entendu de Midwest m'a semblé fort agréable mais ne m'a pas suffit pour me faire une opinion.

Les frères Marie nous quittent en cours de première partie pour aller animer une soirée boeuf dans un bar proche. Nous les rejoindrons peut être plus tard. A la pose, juste le temps de me présenter à Marc Loison, de s'abreuver et nous regagnons la salle.

Bo Weavil:

Le duo de choc est sur scène. Boogie Matt à la guitare, à l'harmo et au chant a l'air d'un mafieux, costard et chapeau à mi-chemin entre Robert Johnson et Al Capone. Je m'attends à tout instant à le voir nous sortir une mitraillette à camembert. Sleepy Vince à la contrebasse avec sa banane très années 50 à plutôt l'air de sortir de la série TV Les jours heureux. Voyons voir ce que ça donne. Et bien j'ai vu.

Le son de guitare sale et baveux la voix profonde et la contrebasse régulière nous emportent dans le Blues d'avant guerre. En fermant les yeux, j'avais l'impression d'entendre ces vielles galettes de Charley Patton, John Lee Hooker, Robert Johnson et consort. Je ne suis pas un grand amateur du genre mais alors là, tout y est le look, le son, l'âme, l'énergie et le talent. Qui a dit qu'il fallait être noir pour jouer le Blues ?

Vince nous fait claquer les cordes façon Rockab, ce qui fait que tout en gardant sa ligne de basse il amène un fond de percussions d'autant plus important qu'il n'y a pas de batterie. Le public ne s'y troupe pas et sur les boogies se laisse aller à taper dans les mains.
Après quelques morceaux, il passera à la planche à laver pour notre plus grand bonheur, puis à la batterie avec un jeu plutôt minimaliste qui colle parfaitement au style. Ce mec a été touché par la grâce.

Pour Boogie Matt, je ne sais vraiment pas comment vous dire, il n'y a rien a jeter. Voix, guitare, chant, je prends tout. Il a du se forger l'âme à coups de 78 tours ou alors c'est un extraterrestre. E.T a le Blues il n'a pas pu téléphoner à la maison, par contre la communication avec la maison de l'étudiant a vraiment été d'une grande qualité, pas la moindre interférence. A la fin du concert, j'ai l'impression d'être à une de ces soirées entre amis ou le maître de maison sort sa guitare pour nous montrer ses dernières trouvailles. En sortant de la salle, le public arbore un sourire béat qui fait plaisir à voir. Je dois être comme eux, voir pire. J'ai passé un quart d'heure à ne pouvoir dire qu'une chose "C'était bien, vraiment bien".

à lire dans la Gazette de Greenwood:
interview: Les Bo Weavil, le charançon du coton qui dévore tout LGDG n°40
Midnight Rumble with Bo Weavil: un sacré millésime!", LGDG n°35

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The Fabulous Thunderbirds: LIVE

date: 21 février 2002
de: René Malines <renemalin@aol.com>

Il y a quelques temps, l'ami Benoît Felten se plaignait dans ces colonnes du manque de "punch" de Smokin' Joint, le live de Kim Wilson. Le même Kim Wilson nous revient, toujours en live, mais cette fois-ci à la tête des Fabulous Thunderbirds, groupe qui fit son succès il y a déjà plus de 20 ans, au sein duquel, aux côtés de Jimmie Vaughan, il inventait avec ses compères ce qu'on appellera le rockin' blues, si cher à nos Doo The Doo.

Wilson est aujourd'hui le seul rescapé de cette époque mythique, mais si le line-up actuel ne sonne plus du tout de la même façon, c'est quand même à une belle brochette de musiciens qu'on a affaire, jugez plutôt :

Outre Kim lui-même à l'harmo et au chant, c'est LE Kid Ramos qui tient la guitare, LE Gene Taylor aux claviers - oui, le même qui accompagnait les frères Alvin dans The Blasters, le Rock & Roll Band à l'existence trop brève, - alors que Willie Campbell et Steve Hodges assurent respectivement à la basse et à la batterie.
Sans oublier les chœurs et la section de cuivres, ce qui nous fait quand même une petite formation de 11 personnes, tous en grande forme.

Ce 16 février 2000 les T-Birds ne se sont pas embarassés d'expériences en proposant de nouvelles compos au public restreint (environ 200 personnes). Non, ce soir-là, il fallait être convaincants, et le groupe n'a pas pris de risque. C'est sans doute pourquoi nous n'avons que 3 originaux de Kim Wilson sur les 13 titres proposés.

Mais au fait, pourquoi fallait-il particulièrement assurer? Et pourquoi un public restreint? Eh bien parce que c'était un concert à guichet fermé, sur invitation, où l'on enregistrait pour l'une des toutes premières fois sur un multi-pistes digital à haute résolution (se reporter à la pochette pour les détails techniques). En tous cas, le résultat est à la hauteur : un son superbe, une patate d'enfer ! Et tenez-vous bien, un DVD est prévu pour bientôt!

Ce fut certainement un excellent concert, durant lequel le Kid a pu démontrer son talent dans divers styles, dont de superbes jump blues avec The Hustle Is On et Where Were You. Kim Wilson n'est pas en reste, se taillant la part du lion comme leader chanteur, sans doute l'un des meilleurs vocalistes de la scène internationale actuelle. L'homme au crâne rasé s'en donne à cœur joie à l'harmonica, particulièrement sur Early Every Morning où il s'offre un long solo qui vient rappeler, si besoin était, qu'il est aussi un maître du petit instrument. My Babe, Wrap It Up, She's Tough, Tuff Enuff, les reprises qui ont fait le succès des Fabulous Thunderbirds se succèdent pour le plus grand plaisir des fans du groupe, ça pète dans tous les sens, on se régale! Voilà un album qui, comme disait l'autre, n'engendre pas la morosité.

Souhaitons que l'ami Benoît y retrouve le Kim Wilson qu'il aime.

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Doug James
Blow Mr. Low

date: 14 février 2002
de: Benoît "Planet Harmonica" Felten <ben@planetharmonica.com>

Le saxophone baryton est un instrument peu usité, quels que soient les styles musicaux: les solistes sur cet instrument dans le jazz se comptent sur les doigts d'une main, quelques figures du blues et du R&B ont intégré l'instrument dans les années 60, et le groupe de rock alternatif Morphine s'en est beaucoup servi à travers les années 90, mais dans l'ensemble on peut dire que sa présence ailleurs que dans des big bands et des sections cuivres est rarissime. C'est pour cela que j'ai été tenté par cet album, ayant toujours apprécié ce son grave, pêchu et imposant qui tranche avec le son plus fluide des saxophones plus aigüs. Le fait d'avoir vu Doug James à l'oeuvre au concert de Duke Robillard au New Morning [voir article ci-dessus] m'encourageait fort à écouter ce qu'il faisait sur disque.

Première constatation, pour ceux qui comme moi aiment le swing, cet album est entièrement swing, contrairement aux albums de Duke Robillard, justement, qui se partagent entre jazzy/swing et texan/early rock n' roll.
Deuxième constatation : les instrumentaux se taillent la part belle puisque sur les dix morceaux du disque seuls quatre sont chantés (deux par Duke Robillard et deux par Sugar Ray Norcia).

L'instrumental qui ouvre le disque (Extra Axle) est pêchu, mais l'arrangement est un peu trop chargé à mon goût. Suivent deux morceaux chantés, l'un assez blues swinguant et l'autre carrément jazzy, tous les deux très sympas. Ensuite, on rentre dans le coeur du disque, une succession d'instrumentaux tantôt swing, tantôt bluesy, tantôt carrément jazz. On sent une influence forte du R&B des années 50-60 (Louis Jordan, Louis Prima me viennent à l'esprit) c'est vraiment très bien joué, et le son du Baryton de James est vraiment parfait: instantanément reconnaissable, occupant le bas du spectre plus souvent que le reste de sa tessiture, des notes qui se détachent bien, pas de tentatives ridicules de jouer trop vite, James prend le temps de poser des chorus mélodiques, chauds et en même temps punchy.

Mention spéciale pour l'instrumental Blues for Leo, qui fait très Blue Note, et sur lequel, en plus d'un thème élégant et d'une délicate improvisation de Baryton, on se voit offrir un solo de contrebasse absolument superbe...

Bref, le sax baryton, vous en avez peut-être pas beaucoup entendu, mais si vous avez envie de tenter l'expérience, vous pourriez faire pire que de voir ce qu'en sort Doug James. Je ne sais pas si cet album est "trouvable" en France mais en tous cas il vaut vraiment le coup si vous aimez votre blues un peu sophistiqué et jazzy, ou votre jazz accessible et "classique"!

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The Roots
of Chuck Berry

date: 16 février 2002
de: Didier "Don't Forget To Boogie" Van Den Branden <divdbranden@swing.be>

Si ce n'est Maybellene, Roll over Beethoven et Johnny B. Goode, Chuck Berry je connais pas bien... hum.
Et puis l'autre jour à la médiathèque [NDLR: de Bruxelles](NDLA: ben tiens!), je tombe sur un cd intitulé "The Roots of Chuck Berry". Etait-ce un hasard?? Après quelques hésitations, je l'ai loué en me disant "Ca sort chez Catfish, ça doit pas être n'importe quoi!" De quoi s'agit-il??
Et bien, tout simplement des artistes qui ont influencé ou desquels Chuck Berry a repris des morceaux (Il y a déjà eu ce genre de cd avec le Grateful Dead). On y retrouve des enregistrements allant de 1938 (Tommy Dorsey & His Orchestra) à 1951 (Elmore James et James Wayne).

Ce qui ajoute à la qualité de l'objet ce sont les commentaires d'un certain Fred Rothwell en regard de chaque morceau qui nous expliquent qui sont les artistes présents sur le cd et en quoi ils sont importants dans l'oeuvre de Chuck Berry.

Les 6 premiers morceaux sont des boogies (sauf le 3: Worried Life Blues de Big Maceo, ahhh, cette voix...) incroyables. Notamment Rock Awhile de Goree Carter & His Hepcats (1949): le rock 'n roll est né. Aussi le Big 3 Trio avec Willie Dixon (avec lequel Chuck Berry a joué). Ils interprètent Big 3 Stomp, un instrumental (où je trouve une ressemblance avec un morceau de Bird, ne me demandez pas lequel, il faudrait que je fouille dans ma série de cd dudit oiseau). Quelle énergie, incroyable!!

Du n° 7 au 11, on voyage plus dans le jazz avec Tommy Dorsey & His Orchestra (à l'écoute duquel Chuck Berry aurait décidé de devenir musicien), Duke Ellington et Benny Goodman Orchestra (au sein duquel joue Charlie Christian, l'autre influence texane de Chuck Berry avec T-Bone Walker).

On y trouve également Beer Drinking Woman de Memphis Slim, Me & my chauffeur Blues de Mempis Minnie, une des idoles de Chuck Berry, il se serait inspiré de cette chanson pour son I want to be your driver.

Autres bonnes surprises: Drifting Blues de Johnny Moore's Three Blazers avec Charles Brown au chant (wahouuuu, quel feeling!), le Don't you lie to me de Tampa Red (mai 1940) que Chuck Berry repris en 60 ainsi que le Worried Life Blues de Big Maceo et Junco Partner de James Wayne (1951) adapté par Chuck Berry en 61 sous le titre The Man & the Donkey.

Pour clôturer ce cd, le Mean old world de T-Bone Walker, un des guitariste, si pas LE guitariste qui a le plus influencé Chuck Berry. Il a repris cette chanson pas moins de 6 fois sans jamais arrivé à la "majesté" de l'original (C'est Fred Rothwell qui le dit!).

En résumé, un très bon cd "découverte" qui m'a fait écouter Chuck Berry par les artistes qui l'ont précédés et surtout influencés.




date: 17 février 2002
de: Jean-Michel Borello < jeanmichel63@wanadoo.fr>

Je ne sais pas si ça ne figure pas sur le cd "roots of Chuck Berry" que tu cites ou si tu l'as volontairement omis, mais Chuck a toujours dit dans ses interviews que sa principale influence était Bill Jennings, longtemps guitariste chez Louis Jordan. Il semble bien que sa classique technique des "double stops" ,c'est à dire des fragments d'accords (souvent des bouts de neuvième) intégrés dans ses solos vienne de là.

Bill Jennings a ensuite accompagné le grand sax Willie "Gator" Jackson et l'organiste Jack Mc Duff. Quelques disques en solo chez Prestige. Il fait partie de ces types à la frontière du jazz et du blues,souvent très intéressants à écouter,comme Billy Butler (longtemps chez Bill Dogget et responsable du solo de Honky Tonk) ou même Grant Green.
Vocalement,aussi, j'entends beaucoup de Louis Jordan chez Chuck,dans le débit,les accentuations.Et dans l'humour des paroles aussi.

Je trouve qu'on a un peu trop facilement classé Chuck Berry dans le Rock'n'Roll alors que tout son jeu est pétri de blues. Et n'oublions pas qu'il était accompagné par la crème de chez Chess dans ses premiers enregistrements: Willie Dixon, Fred Below, Lafayette Leake ou Otis Spann, Matt Guitar Murphy ou Bo Diddley.... Et bien sur, Jimmie Johnson.

C''est toujours un grand sujet de discussion quand je veux faire" Carol" ou "Around and around" avec les Reapers : "qu'est ce que tu nous gonfles avec ton R'n'R ?.." Hé bien non,je n'ai aucun problème éthique pour enchainer un Chuck après un Muddy!! Pour moi,c'est la même musique.

Même si on peut avoir des réserves sur le bonhomme lui même et sur les pitoyables prestations qu'il fait depuis vingt ans, il restera toujours pour moi un très très grand.

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Skip James
son Style

la question est tombée comme ça, abrupte, sur la mailing-list LGDG:

Je me pose justement une question au sujet du style de Skip James. Son style est-il totalement personnel ou existe-t-il d'autres bluesmen proches de sa façon de jouer le blues? Est-il affilié à un micro-courant du Delta Blues?... Au cours de mes lectures sur le blues, j'ai rencontré les deux "théories" et j'aimerais avoir plus d'informations...

C'est Mike (<katymiki@hotmail.com>) qui la pose, Patrice et Phil répondent :-)




date: 13 février 2002
de: Patrice Champarou <pmchamp@club-internet.fr>

On a dit que Skip James se rattachait à une tradition locale aux alentours de Bentonia, sa ville natale... je crois d'ailleurs qu'on en avait déjà parlé, quelqu'un sur la liste avait affirmé que le style de Jack Owens, calqué sur celui de "Skip", était nettement plus accompli... Paul Oliver mentionne Owens, ainsi qu'Henry Stucky dont il n'existe aucun enregistrement à ma connaissance, mais en dehors de ces deux noms rien ne permet d'étayer la thèse d'une "école" particulière. Si Owens avait réellement partagé le style de Skip James en 1931, on comprend difficilement pourquoi seul ce dernier a enregistré alors que les deux hommes étaient très liés.

Skip James
Skip James
(photo Biograph records 1964)
Sur le plan vocal, indépendamment de son timbre très particulier (différent d'ailleurs avant-guerre de ce qu'il est devenu après sa redécouverte, car mon orthophoniste préférée m'a fait remarquer qu'il chantait à l'origine en voix de poitrine et non en voix de tête ) je trouve que le chant de James se rattache à celui de Jackson ( Mississippi ) par la manière dont il prolonge les phrases en amplifiant le volume, comme Tommy Johnson ou Ishman Bracey, Arthur Pettis et peut-être même Rubin Lacey... pour l'attaque, il faudrait que je me penche sur la question, ainsi que pour les modes d'ailleurs (nom d'un chien, filez-moi la retraite tout de suite qu'on n'en parle plus ;)

Quant au style de guitare... je crois que, comme pour Robert Johnson (et à la réflexion, Blind Lemon lui-même) il résulte de la démarche personnelle d'un individu qui s'est attaché à reproduire des effets pianistiques, inventant des techniques qui se démarquent de la tradition (bon, d'accord, pour Jefferson c'est difficile à établir... mais comme Skip James, il jouait également du piano, et son jeu ne ressemble vraiment pas à celui de Miles Pruitt, de Sam Butler ou de Sylvester Weaver, tous les trois nettement plus "guitaristiques" )

Je ne connais personne parmi les bluesmen d'avant-guerre qui ait pratiqué le jeu en octaves, et quelles que soient les qualités du jeu d'Owens (qui présente des subtilités rythmiques intéressantes) je pense qu'il a tout simplement calqué ses positions sur celles que James a élaborées après son séjour dans l'Arkansas dans les années vingt. Au reste, je n'ai pas entendu beaucoup d'enregistrements d'Owens mais je doute qu'il soit capable d'atteindre à la main droite la vélocité nécessaire pour jouer "I'm So Glad"

D'une manière plus générale, mes discussions avec mon ami Claude Worms, spécialiste de flamenco, nous ont amenés à constater que ce que l'on considère comme des traditions locales ou des courants stylistiques s'articule le plus souvent autour d'UN créateur particulièrement original. C'est évidemment plus net dans le flamenco, puisque les styles portent des noms fixes et se réfèrent souvent à leur interprète original... Mais s'il y a une chose que je peux affirmer sans discussion possible, c'est qu'il n'existe aucun enregistrement d'avant-guerre présentant un style de guitare comparable à celui de Skip James, pas même les deux faces de "Mississipi" Bracey qui chante à peu près comme lui.






date: 13 février 2002
de: Phil Catfish < Philpretet@aol.com>

Peut-on résumer l'existence ou non d'une école en l'occurrence celle de Bentonia à deux voire trois noms cités pêle-mêle ? Difficile de répondre par l'affirmative même si Henry Stuckey (qui n'a effectivement jamais enregistré cher Pat ;-) est considéré comme l'un des créateurs du fameux "Bentonia Sound" cher à Gérard Herzhaft.

Il n'en demeure pas moins vrai que Skip James doit beaucoup à Henry Stuckey et à d'autres vieux bluesmen locaux qui lui ont permis (comme à d'autres) de se forger son propre style.

Patrice a écrit: Si Owens avait réellemnt partagé le style de Skip James en 1931, on comprend difficilement pourquoi seul ce dernier a enregistré alors que les deux hommes étaient très liés.

Un éclairage historique me parait nécessaire pour ouvrir le débat suite à l'argumentation de Pat.

D'une part , lorsque Skip James enregistre les faces Paramount en 1931, l'industrie du disque aux Etat Unis est en pleine panade. (crise de 1929 oblige) Il est donc plausible que le contexte économique désastreux explique l'échec de leur distribution et les désillusions de Skip James qui s'en retourne dans sa campagne avant d'être redécouvert dans les années 60.

Jack Owens (photo Philippe Pretet)
Jack Owens, Utrecht 1995
(photo Philippe Pretet)
D'autre part, les circonstances de cet enregistrement méritent la plus grande attention.
A ma connaissance, Jack Owens et Skip James se sont surtout cotoyés au début des années 20 dans plusieurs fêtes et bals qu'ils animèrent ensemble autour de Bentonia. Pour autant, aucune source (à ma connaissance) ne les présente a priori comme de grands amis, mais plutôt comme des bluesmen de la même génération et originaires de la même contrée qui jouaient ensemble opinément.

Par ailleurs, Skip James qui a beaucoup voyagé, a habité avec Johnnie Temple une petite chambre à Jackson (Ms) en 1930. A l'issue d'une audition commune avec JC SPEIR, un talent-scout, seul Skip James sera retenu. Il partira enregistrer en février 1931 pour Paramount dans le Wisconsin, plusieurs titres exceptionnels, dont l'un des chefs d'oeuvre du blues qu'est à mon avis "Hard Time Killin' Floor Blues".

Or, Jack Owens était de son côté salarié et travaillait dans les champs de coton, activité qu'il a gardée pendant une quarantaine d'années. Il semble qu'il n'ait jamais voulu quitter la proche région de Bentonia. David Evans qui l'a découvert au début des années 60 n'a jamais réussi à le faire "bouger" au-delà d'un rayon de 100 kilomètres. Ceci peut donc expliquer cela.

Pour l'anecdote, lorsque je l'ai rencontré en backstage pour une séance photos au blues estafette en 1995, il n'avait jamais pris l'avion!

Patrice a écrit: Au reste, je n'ai pas entendu beaucoup d'enregistrements d'Owens mais je doute qu'il soit capable d'atteindre à la main droite la vélocité nécessaire pour jouer "I'm So Glad"

Je crois effectivement qu'il est illusoire de vouloir comparer la dextérité de Skip James avec celle de Jack Owens. Néanmoins, ce qui est sûr c'est que la technique de Jack Owens en finger picking à trois doigts n'est pas fondamentalement différente et qu'il existe entre eux plus d'affinités dans le style qu'il n'y parait !

Enfin, la version bouleversante de I'm so glad qu'il a jouée à 93 ans passés en fingerpicking (que j'ai eu le privilège d'écouter à Utrecht en backstage) me fait dire à tout le moins que Jack Owens était un bluesman rural qui n'a pas eu de son vivant tout le succès qu'il aurait mérité.

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Le débat du mois : l'âme du Blues

Le débat sur l'authenticité du Blues est un des thèmes récurrents de la liste de discussion. On croirait que tout a été dit sur ce sujet et pourtant, en cette quatrième année, c'est toujours un plaisir de découvrir à chaque fois de nouveaux arguments émis par les uns et les autres.

Voici quelques morceaux choisis avec la complicité de Michaël Duval, René Malines, Véronique Chelius, Benoît "Planet Harmonica" Felten, Patrice Champarou, OLivier "Uncle Lee", David Escande, Pascal "L'oreille Bleue" et Xavier "Delta Blues".

Aux ciseaux et à la colle : Pierrot "Mississippi" Mercier

Mike

Je ne veux pas critiquer le blues français et il peut paraître important d'en parler, mais il occupe une place peut-être excessive parmi tous les mails que je reçois. Il est souvent davantage question des CD de blues français que de ceux des quelques grands bluesmen - pour combien de temps?- encore vivants. Il ne faudrait pas oublier que c'est grâce à eux que le blues français existe.

Les Hoodoomen, Elmore D... sont intéressants et j'irai les voir en concert si l'occasion se présente mais ils ne constituent pas, à mon sens, "l'âme" du blues.

René

Permets-moi de ne pas être d'accord.

Si le blues a une âme, c'est qu'il est vivant.

Si les Hoodoomen ou Elmore D jouent le blues, bien sûr que c'est grâce à ceux qui l'ont fait avant eux (en ça, tu as 100% raison). Mais si le blues est vivant aujourd'hui, c'est aussi grâce à des gens comme eux.

Aujourd'hui, il n'y a plus de raison de faire le distinguo entre la nationalité, la couleur de la peau ou l'origine géographique des divers musiciens de blues, parce que leur apprentissage est sensiblement le même.

Bien sûr, il peut y avoir l'influence du contexte familial.

Le père de Franck Ash l'amenait aux concerts de blues alors qu'il était encore très jeune. A 5 ans, il voyait Muddy Waters sur scène, à 8 ans, pour son anniversaire, il demandait un album de B.B.King. Il y a 34 ans, mon frangin le Loup Blanc se mettait à la guitare pour jouer le blues, influencé par les disques que mon père avait empruntés à la base américaine d'Istres où il travaillait. Le père de Matt Arrow, de Bo Weavil, jouait déjà le blues avant sa naissance. Le père de Nico Wayne aussi.

Un jeune noir américain d'Alabama qui se met au blues aujourd'hui, c'est pour les mêmes raisons, ou parce qu'il a vu un concert ou qu'il a écouté un disque qui lui a plu au point de décider de son orientation.

C'est exactement la même chose pour un Français, un Allemand, un Japonais ou un Australien.

Au contraire, les bluesmen nés à la fin du 19ème siècle ou au début du 20ème grandissaient dans un contexte où le blues était non seulement partout, mais, dans la plupart des cas, non seulement la seule musique, mais aussi la seule activité possible en dehors des tâches quotidiennes. Si un mec entendait de la musique, c'était presque toujours du blues. Il n'avait donc pas d'autres choix qu'en faire à son tour ou ne pas devenir musicien.

Aujourd'hui, même au fin fond de la campagne la plus reculée du Sud le plus profond, un jeune gars a plus de chances d'entendre Britney Spears ou Maria Carey à la radio que Muddy, le Wolf ou leurs prédécesseurs. Et donc, s'il se met au blues, c'est un choix personnel, c'est son propre déterminisme. Bien sûr, il peut ressentir qu'il n'a pas eu le choix, que ce n'est pas lui qui a choisi le blues, mais le blues qui l'a choisi lui.

Mais ça, c'est vrai aussi à Mont de Marsan, à Paris, à Kyoto ou à Melbourne.

Donc, l'âme du blues, elle s'appelle Big Bill Morganfield, Corey Harris, Keith B.Brown, mais aussi the Hoodoomen, Elmore D, Bo Weavil, etc.

Véro

Qu'en peu de mots ces choses là sont mises. mais rudement bien écrites.

Sentiment partagé par la plupart d'entre nous sans doute, à une époque où on entend de tout (et, hélas n'importe quoi).

Cela nous oblige à savoir faire des choix, à aiguiser notre sens du discernement jusqu'au jour du coup de foudre musical !

L'âme du blues, elle est là dès que quelqu'un se met sur les twelve bars. Et elle est loin d'être morte, tant pis pour Gogol.

Mike

Par le mot âme, je voulais dire "l'essence du blues", sa "substantifique moelle". Les grands créateurs du blues vont à mon avis, au-delà de la simple musique ("musique objective" voir à ce sujet la citation de Gurjieff que Stephan Grossman propose dans l'introduction de son anthologie Delta blues, Oak Publications, 1988).

Je pense qu'il existe deux formes de blues : le premier, "authentique", qui est lié à des conditions socio-historiques particulières et le second, qui n'est qu'un courant musical parmi tant d'autres. Quoi de commun entre un solo de BB King et un solo de Franck Ash ? Sans vouloir paraître trop pompeux (je crois que c'est déjà raté), écouter Son House m'apprend des choses sur la "condition humaine" (les citations sont littéraires ce matin !), Elmore D me fait passer un bon moment.

René

Marrant, moi, les 2 me font cet effet.

Mais il y a un facteur à ne pas négliger quand on écoute de la musique : l'attitude "à priori" de l'auditeur, consciente ou pas.

Si tu pars du principe qu'un européen blanc vivant n'aura jamais la même profondeur qu'un bluesman américain noir disparu, il est EVIDENT que tu ne pourras jamais changer d'avis, puisque, consciemment ou pas, TU TE L'INTERDIS !

La différence ne vient pas des artistes (du moins dans cet exemple, Elmore D étant un des artistes contemporains les plus représentatifs de ce que peut être le "vrai" blues), mais bien du crédit que leur accorde l'auditeur au départ, avant même l'écoute.

Si je me permets de dire ça, c'est parce que c'est un travers que j'ai découvert d'abord chez moi. Et j'ai assez tôt compris que la meilleure façon de comprendre l'autre, c'est d'abord de me connaître moi-même, le bon comme le moins bon.

Mike

Je prends tout à fait en compte ta remarque, très judicieuse d'ailleurs. Apprendre à se connaître par le blues est une voie royale ! Mais je crois que oui, en matière de blues un européen blanc vivant mais également un jeune noir américain (ex, Big Bill Morganfield) n'aura jamais la même profondeur qu'un bluesman américain noir disparu (ou pas encore). Je ne dis pas qu'un blanc européen n'est pas capable de transmettre d'émotion, mais je pense que cette dernière est différente.

Toute forme d'art porte en elle, une représentation de son époque. Son House, par sa musique, porte en lui la condition des noirs américains.

Je joue de la guitare pour mieux comprendre, pour mieux apprécier le blues. Quand bien même techniquement j'atteindrais la perfection, je ne serai jamais un bluesman.

Ben

Voici mon avis, qui est peut-être moins tranché que l'avis malinien.

Le cœur du blues au sens "noble" du terme (c'est à dire pas un courant musical mais une expression sociale) on ne peut évidemment le trouver que chez ceux qui appartiennent ou ont appartenu au pan de la société c'est à dire, pour l'essentiel, des noirs qui ont connu les plantations. A ce titre, ce qu'on appelle aujourd'hui le blues n'est pas la même chose que ce "blues" là.

Mais n'est-ce pas une vision un peu réductrice du blues ? Sans doute. On pourrait dire par exemple que le blues est l'expression d'une souffrance, soit par la tristesse et la colère, soit par la joie (pour oublier ses malheurs.) Cette définition là n'exclut pas la première, mais englobe plus largement un style qui a certaines caractéristiques musicales qui définissent son appartenance, et qui a aussi une signification dans l'expression de son contenu.

Personnellement, je me reconnais dans cette définition là, celle de quelqu'un qui a quelque chose à dire et qui le dit à travers un style musical proche de celui de blues "noble" mentionné plus haut.

Une troisième définition, plus large, pourrait consister à réduire le blues à ses expressions "musicales" ou "émotionnelles", l'émotion étant dans cette acception transmise par "l'interprétation" et pas par le "contenu". C'est à mon avis la définition la plus communément acceptée. C'est pour ma part le blues dans cette troisième acception qui me divertit éventuellement (quand c'est bien fait) mais m'émeut rarement. Ce qui n'empêche que ça puisse être tout à fait agréable (comme hier soir chez Duke. [Robillard au New Morning, NDLR]

Pour prendre quelques exemples, je classerais sans hésiter Muddy Waters, Son House, JB Lenoir et d'autres dans la première catégorie.

Je mettrais, par exemple Paul deLay, El Fish, Lee Sankey, Corey Harris dans la seconde (ils parlent de choses qui sont plus contemporaines que les thèmes abordés par le blues "noble" mais qui sont néanmoins proches dans l'esprit : la prison (Paul deLay - The Prisoner's Song) , l'oppression professionnelle (El Fish - Copydog / Lee Sankey - Office Politics), les difficiles relations amoureuses (Paul deLay - Don't shame me / Lee Sankey -S'spicious woman), la drogue et la dépendance (Paul deLay - Slip, stumble and fall), la douleur amoureuse (El Fish - Ain't gonna hurt you), la pauvreté (Paul deLay - Wealthy man), l'oppression policière (Corey Harris - Between Midnight and Day).

Enfin, dans la troisième catégorie ils sont légion. "L'industrie" du blues a tendance à réduire cette musique à son expression musicale ce qui, pour moi, est bien regrettable. Ca peut-être divertissant, mais ça n'en est pas moins triste...

Quant à Elmore D je n'ai pas eu l'heur de l'entendre mais je pense savoir qu'il se situerait plus dans la seconde catégorie que dans la troisième, non ?

Olivier

mmh... je comprends ce que tu veux dire par tes catégories, et ça a au moins le mérite d'essayer de clarifier les choses.

La première catégorie est clairement identifiée (bien qu'elle contienne tellement de musiciens différents, aux motivations et aux vies différentes, etc.), mais les deux autres sont beaucoup plus floues. Ou alors il faut admettre que ce sont des catégories personnelles où chacun range qui il veut selon son feeling...

Patrice

Grossman dit très exactement : objective music is all based on "inner octaves"... et je n'ai toujours pas compris ce qu'il entendait par-là ( non, c'est pas le moment de citer Pierre Dac ! ;) Jéricho, Orphée... moi je veux bien, même les moirages harmoniques de notre cher Bruno si on m'explique lentement... mais je crois que l'émotion musicale est liée à des phénomènes analysables (-après coup, bien évidemment que l'émotion vient - ou ne vient pas - en premier ;)

C'est pourquoi la distinction "plain music/objective music" m'échappe totalement... la musique de chiottes, ça n'existe pas, c'est simplement autre chose que de la musique, "l'art de combiner les sons d'une manière agréable à l'oreille" comme disait le petit Druihle, concentrant en une simple formule toute la bêtise de Mac Mahon et de Joseph Prudhomme.

Tout ça pour dire que :

> Je suis d'accord, mais parle-t-on du même blues ?

C'est ici une question centrale que l'on gère avec une grande tolérance sans jamais s'égarer complètement, ce qui est déjà un acquis rare ;)

Le blues "authentique" est lui-même constitué d'une multitude de courants musicaux, on peut fondre en larmes en écoutant Sleepy John Estes et rester de marbre devant la voix d'Alberta Hunter... ou même de Ma Rainey. Mon excitation est bien plus intense lorsque j'entends Papa Charlie Jackson que lorsque je me fade Walter Davis ou que j'inflige à ma femme une deuxième face de Peetie Wheatstraw - nooooooon j'arrête, promis ! ;)))

Certes, il se dégage de la musique de BB King quelque chose que j'ai du mal à retrouver chez... bon, pas de noms - mais bien malin celui qui peut déceler dans son art une preuve de son cousinage avec Bukka White... et moi qui suis convaincu que le blues ne peut perdurer qu'en "sachant d'où il vient", comme a dit un jour Christophe, j'avoue avoir été déçu par la prestation scénique de grands bonshommes comme John Estes, Big Joe Williams... et même un Muddy pas en forme! Les retransmissions télévisuelles des dernières prestations de Hooker ou Junior Wells m'ont semblé pitoyables, et je crois que tout musicien peut évoluer vers le meilleur comme vers le pire, se livrer en toute générosité à l'art consommé de prendre des risques (ma définition de la musique ;) ou sombrer dans la facilité la plus affligeante.

Pour nous qui n'avons que rarement cueilli du coton, élevé des digues ou filtré de la térébenthine, encore moins ressenti l'humiliation d'être considérés comme appartenant à une sous-catégorie humaine, je crois qu'aimer le blues signifie accepter une succession de "rencontres" avec les musiciens (d'ailleurs généralement très individualistes ) qui l'ont porté.

David

J'approuve des 2 oreilles cette petite phrase qui résume le plaisir que j'ai à découvrir le blues un peu plus chaque jour. Quand je vais à la médiathèque de Besançon pour prendre des trucs dont j'ai entendu parler sur LGDG ou ailleurs. Et qu'ensuite je rentre chez moi pour les écouter, j'ai parfois des "rencontres" qui me procure un réel plaisir même si je ne comprends pas toujours bien ce que ça raconte et que je ne possède aucune notions musicales, je sens qu'il y a quelque chose que je ne saurais définir, mais qui me fait réécouter le cd encore et encore !

René

Donc, il y a un critère évident, indiscutable : une émotion donnée liée à une situation donnée.

Cela dit, si nous sommes capables de l'apprécier, c'est qu'elle ne nous est pas totalement étrangère.

Car si ni toi ni moi ne connaissons la souffrance de l'homme réduit aux chaînes, à la pauvreté et au racisme à cause de sa naissance, toi et moi, aussi heureuses qu'aient pu être nos vies, avons eu notre part de souffrance, de frustration, de douleur... et de joie, d'amour, de bonheur - n'oublions pas que le blues, c'est çà aussi ! -

Si ce blues-là nous était étranger, nous ne serions pas là à en discuter ! CQFD ! Et ok, je veux bien qu'Elmore D ne sera jamais Son House - et Son House n'a jamais été Elmore D non plus, d'ailleurs ;)

Ok, ok, l'un est un modèle pour l'autre et pas le contraire, je te l'accorde volontiers.

Franck Ash non plus ne sera jamais B.B.King, et il n'en a jamais eu la prétention. N'empêche qu'aujourd'hui, je préfère écouter le B.B.King d'il y a 50 ans ou le Franck Ash d'aujourd'hui au B.B.King d'aujourd'hui, malgré tout le respect que je lui dois, ceci dit sans la moindre ironie.

Bref, pour en revenir à ce que tu disais, chacun représente ce qu'il est, et ne peux exprimer sincèrement et pleinement que çà.

Et là où je "rippe" un peu sur certains arguments, c'est quand j'ai l'impression de lire ou d'entendre que certains êtres humains auraient, de par leur souffrance, une plus grande valeur que d'autres J'ai tendance à ne voir dans ces arguments qu'une forme tordue d'un racisme - rien de personnel, t'affoles pas, j'expose un point de vue, je n'attaque personne - et surtout une espèce de complexe de culpabilité du blanc descendant de l'oppresseur du "pauvre noir". Ne voies pas non plus une quelconque thèse révisionniste là-dedans, mais ce que je veux dire, c'est

  1. aucun peuple ne me semble meilleur qu'un autre
  2. aucune souffrance ne me semble plus noble qu'une autre.
Ben

Je n'ai jamais entendu Franck Ash (Aïe ! Nathalie, pas sur la tête) mais j'ai vu BB King en concert plusieurs fois ces dix dernières années, et je peux dire sans ambages que je suis d'accord avec René : c'est pas possible de faire MOINS plein d'émotion et de sens que BB King superstar avec sa chemise hawaïenne...

Mike

Il est évident que le blues nous touche émotionnellement, comme n'importe quelle forme d'art ! Son House porte en lui la condition des noirs américains, oui ! Tout comme la poésie des Surréalistes après la première guerre mondiale porte en elle la vision d'un monde anéanti par quatre années de guerre. Chaque forme d'art est poussée par une "nécessité" de l'homme de s'exprimer à une époque donnée, dans une forme donnée. Il fallait que son House chante du blues, il fallait que les poètes de l'entre deux guerres exprime l'absurdité du monde.

Les musiciens qui jouent du blues en France (ou ailleurs) aujourd'hui, sont-ils poussés par cette nécessité ? Si les jeunes noirs américains refusent le blues, ce n'est pas un hasard. Cette forme d'art correspond à une autre époque... ce qui ne nous empêche pas de l'apprécier.

René

Le contexte est différent, mais je n'hésiterai pas à dire que la nécessité est la même : sortir ce qu'on a en soi. Pour moi, c'est là que se situe toute l'histoire. Et ce qu'on a en soi, encore une fois, c'est la joie et la souffrance, le bonheur et le malheur, le rire et la douleur, l'amour comme la haine. Et même un Duke Robillard ou un B.BKing de 2002, sous leurs dehors de pépères peinards, ont certainement des tas de choses à exprimer dans ce sens-là. De même qu'un Pascal Fouquet, un Mathieu Fromont ou un Little Victor. Enfin, pas tout à fait "de même", mais ce n'est pas qualitatif. Le contexte peut être différent, mais le fond reste le même : en fait, on parle de l'humain, dans ce qu'il a de pire et dans ce qu'il a de meilleur.

Et ça, c'est quelque chose que nous partageons tous. Le pire et le meilleur, mais, surtout, l'humain.

Mike

Il est certain que nous avons en nous toutes ces émotions. Mais si tous ceux qui les ressentent faisaient du blues, ce serait tout de même un peu lassant... ;)

La question que je me pose à présent est : pourquoi choisir, pour exprimer ses émotions, une musique aussi "lointaine" que le blues ?

René

Justement parce qu'elle n'est pas si lointaine que ça !

D'une façon générale, la structure du blues est la structure la plus universelle qui soit, la plus répandue, celle qui semble la plus "naturelle".

Mais aussi parce que n'importe quel habitant d'un pays "riche" âgé de moins de 92 ans 1/2 en a fatalement entendu dès son plus jeune âge, il a grandi avec !

Enfin, il faut nuancer cet argument-là, bien sûr, mais c'est celui que j'ai déjà évoqué en parlant du père de Franck Ash, amateur de jazz et de blues, critique pour des revues spécialisées et biographe de Muddy Waters, qui amenait son gosse de 5 ans aux concerts, du père de Mathieu, qui jouait dans le métro avec Bill Deraime, de mon père, qui aimait les musiques afro-américaines et ramenait des disques à la maison, sans doute influencé par son père à lui, mon grand-père, donc, qui, lorsqu'il était marin, s'était acheté une guitare - sans doute une Martin d'après mon frangin dont ce fut la 1ère guitare - et un banjo 6 cordes aux US et qui en jouait en slide.

Et puis toute notre génération, celle de Woodstock - non, j'y étais pas, j'avais 14 ans, mes parents ne m'auraient jamais laissé partir tout seul là-bas ;) - s'est branchée sur les Stones, les Beatles, Hot Tuna, Joplin, Hendrix, le Dead, Winter, Clapton, Gallagher, Fleetwood Mac, bref des gens dont la musique venait directement du blues quand elle n'était pas uniquement ça.

Je me souviens encore de mon frère Roland ramenant un double 33 tours, compil de bluesmen du Mississippi, dont il était tombé raide dingue alors qu'il devait n'avoir encore que 14 ou 15 ans, alors que je découvrais à peine les Who (influence blues très directe) Zappa (idem) et Magma (là, c'est moins évident, mais le chanteur, Klaus Blasquiz, venait d'un groupe de blues) ou de cette autre compil, du label Blue Horizon elle, qu'il a toujours et que je me suis acheté aux puces. Il y avait les principaux groupes anglais du British Blues Boom et quelques afro-américains tels Eddie Boyd (The Blues Is here To Stay!).

Mike

Le blues serait donc une forme musicale universelle? Elle était là dans l'air et certains n'ont fait que s'en saisir?

Le blues serait plus "naturel" que les jeux vocaux des inuits? Plus naturel qu'un raga indien?

Tu vas me répondre que la musique inuit n'est pas fréquente par chez nous. Ce en quoi tu auras raison.

J'ose affirmer (devrais-je?) que le blues peut être considéré comme une musique "traditionnelle", que l'on peut toujours essayer de le perpétuer, mais que le blues considéré comme l'expression d'une communauté dans un temps et un lieu définis est derrière nous!

A l'âge de 20 ans, j'écoutais de la musique "traditionnelle' (le mot me gêne) iranienne, indienne....mais je souffrais toujours d'entendre dire que les plus grands musiciens avaient vécu au 17 ou 18ème siècle. Ce qui m'a paru fascinant dans le blues, c'est qu'il était suffisamment proche de nous pour que l'on puisse entendre ceux qui ont "créé" cette musique (Charley Patton, Son House...) et que l'histoire du blues était relativement facile à saisir dans son ensemble sans exotisme malsain.

Evidemment j'ai peu à peu dépassé ce stade "intellectualiste" et je suis franchement tombé (avec bonheur) dans le blues.

Tu as donc sûrement raison lorsque tu parles d'âge. Quelqu'un qui a aujourd'hui 50 ou 60 ans ne s'est pas mis à écouter du blues de la même façon que quelqu'un de 20 ou 30 ans (j'ai moi-même 29 ans). Lorsque j'avais 13 ou 14 ans, la musique qui me semblait "naturelle" était plutôt celle de Cure et de New Order (!)

Immergés que nous sommes dans le blues, nous ne nous apercevons pas de la "confidentialité" de cette musique. Pour avoir travaillé sur le blues avec des élèves de 5ème, je peux t'assurer que pour eux, le blues n'est vraiment naturel et que leur montrer un vieux qui joue de la guitare avec un bottleneck (il s'agissait de Bukka White) leur donne l'impression d'être dans une autre dimension.

René

Tu m'as mal compris : je parlais de la structure du blues, de sa construction mélodique. Elle n'est pas propre au blues, on la retrouve presque partout sur la planète. Et naturelle, je l'ai mis entre guillemets, pour faire plus simple. Mais c'était pour expliquer que non, la musique à travers laquelle s'exprime le blues ne nous est pas étrangère du tout. Et bien sûr, mais çà tu l'as bien compris je crois, que le blues lui-même est à l'origine de presque toutes les formes musicales nées au 20ème siècle. Y compris, et tant pis si ça me fait mal de le dire, la "musique" de Cure (beurk !)

Pascal

Bonsoir,
Moi aussi j'arrive après les poissons et comme je suis un peu lent d'esprit dites-moi si j'ai bien compris.

Le vrai Blues c'est celui qui fait vibrer le mec qui écrit le mail.

Le faux Blues c'est celui qui fait vibrer le mec qui lit le mail (même si les deux écoutent la même chose d'ailleurs).

Le vrai Blues c'est celui qui exprime la souffrance d'avant.

Le faux Blues c'est celui qui exprime la souffrance de maintenant mais c'est pas la même souffrance à cause des machine qui ramassent le coton à leur place, ce qui leur laisse tout le chômage qu'ils veulent pour se bourrer de crack.

Bref le vrai Blues c'était avant parce que heu!!! C'était avant.

Et le faux Blues c'est maintenant parce que heu !!! C'est pas avant.

Ou alors c'est tout l'inverse ???

Ou alors ils ont un peu tous raison et

Le vrai Blues c'est celui qu'un mec a fait avec ses tripes (d'avant ou de maintenant).

Le faux Blues c'est celui qu'un mec fait pour le fric (maintenant parce que avant ??)

Reste le problème du Bluesman qui s'est fait greffer des tripes !!!! (Non je ne voulais pas parler de G Moore).

Pour moi le vrai Blues c'est celui d'avant ou de maintenant fait par le BB King d'avant ou de maintenant ou par les Elmore D d'aujourd'hui à la seule condition qu'il me remue les tripes (même si le mec il a pas souffert).

René

Et tout ce temps que j'ai passé à argumenter, alors que tout est là !

Xavier

Salut Villageois

J'ai lu (dévoré ??) avec le PLUS GRAND intérêt le débat sur l'Ame du Blues.

Cela faisait effectivement bien longtemps qu'il n'y avait eu réellement de débat de fond (depuis Les Gros Dieux ?! )

J'ai pris un réel plaisir a décortiquer toutes ces interventions, René (mais non tu n'es pas mégalo ) Mike (1 coup d'gueule et ça repart ) Patrice et les autres...

Mais avec ce débat sur l'Âme du Blues, (Merci Mike d'avoir lancé la boule au milieu des quilles) je m'instruis tout simplement. Pour ma part, je ne me lancerais pas dans le sujet car je n'ai malheureusement pas la culture des gens cités plus haut, ni de ceux qui ne sont pas intervenus d'ailleurs.

Simplement, lorsqu'on parle de la "sensation du blues", ne croyez-vous pas qu'à 1 moment précis de la vie de tout être humain, on ne ressent pas l'envie de faire du Blues, parce que ce jour là on a le Blues ???

Prenons l'exemple d'un scolaire qui rate un exam, un artisan qui fait faillite, un sportif qui rate le podium, etc. ... ne croyez-vous pas que ces gens là, a cet instant précis seraient capables d'écrire une des plus belles chansons de Blues ??

Ce qu'a fait BB King il y 50 ans, et ce qu'il fait maintenant !!! Comment peut-on juger la différence ? Les studios d'enregistrement se sont améliorés, la qualité du support aussi (=> du 78T au CD ). BB King a évolué aussi, (suivi son courant serait plus approprié), ce qui n'empêche que lorsque BB King fait un duo avec Dionne Warwick sur l'album Deuces Wild, ( Humminbirg ) je frissonne quand même, bien que j'écoute cet album depuis sa sortie en 97.

Les frenchies qui font du blues : Pourquoi leur blues serait moins bien que des ricains ?? Ce qui a fait la force du blues que j'aime, (forcémentt le Delta Blues ) c'est plus par l'histoire de l'homme que la musique, ou un habile mixage des deux !!

La musique a fait le reste et m'a permis de découvrir les autres Blues...

Qui pourrait aujourd'hui se targuer d'avoir vécu les vies de Son House, Bukka White, Leadbelly, John Lee Hooker, Robert Johnson etc. ? Aujourd'hui personne !! Alors forcément que le blues français ne peut se rapprocher du blues du Mississippi du début du siècle .. dernier . Mais le blues qui nous vient des USA non plus !! Il en reste des esclaves du coton ??? ( au sens ou on l'entend vous et moi )

Est ce qu'a contrario, des gens comme Awek, Nothin But The Blues, Damien Lopez, Jeff Toto et d'autres ont vécu des vies de bluesman pour chanter le Blues ?? Je ne crois pas !! Peut être un gars comme Karim Albert Kook ....

Pour ma part, je me servirais prochainement de ce débat comme fil conducteur d'une émission ( à la Malika, quoi !!! )

Merci pour votre culture .... à tous

Amicalement

[NDLR Xavier est l'animateur de Delta Blues sur Radio Albigés]

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